Bonjour toi 😉

Je te rappelle que les épisodes précédents se trouvent ici .

Héloïse n’en revenait pas, Stefano refusait d’embrasser la grenouille.

— Pourtant, ce n’est pas difficile, tu avances ta bouche comme ça et paf, c’est fini.

Héloïse mimait ça très bien et le gamin ne put s’empêcher de rire.

— Tu vois, c’est rigolo.

— Ce n’est pas toi qui vas avoir le truc tout froid et gluant sur les lèvres. T’as qu’à le faire toi !

— J’peux pas, j’suis une fille !

Héloïse tapait du pied.

— Tu ne comprends rien.

— Que se passe-t-il ici ?

Aucun des deux n’avait entendu Jo arriver.

— Elle veut que j’embrasse la grenouille.

Stefano soufflait comme un bœuf

— Je ne veux pas, c’est dégoutant.

— Oui, mais s’il ne le fait pas, elle ne redeviendra jamais sorcière des rivières.

Joe se gratta la tête.

**********

Dans l’autre monde, Straurius était furieux. Il ne souhaitait pas s’en prendre à Isaulya qu’il savait très attachée à sa sœur.

— Je vais encore devoir y aller. Ce monde ne me plait pas. Il n’y arrive que des misères, pas ici.

Isaulya soupira. Elle ne put s’empêcher de penser que Straurius aimerait retrouver Shearah. Elle avait pris soin de fermer son esprit afin que le sorcier ne comprenne pas sa peine et sa peur de le perdre. La jalousie n’avait pas de place dans leur monde, d’autant plus qu’elle connaissait suffisamment Straurius, jamais, il ne trahirait sa parole. Mais justement, sa sœur avait trahi la sienne et ça, elle savait qu’il aurait du mal à lui pardonner.

— Inutile de te déplacer, je suis là.

Shearah lui faisait face dans toute sa beauté. La grande prêtresse lui tendit les bras. Elles s’embrassèrent. Straurius ne fit pas un geste.

Elle s’inclina devant lui comme elle devait le faire et relevant le menton, elle le toisa :

— C’est tout ce que tu as trouvé pour me faire revenir ici ? Nous avions pourtant passé un pacte et je pensais que tu le respecterais. Tu as trahi ma confiance Straurius. Je ne comprends pas comment tu as pu te rabaisser à une telle chose, c’est digne de notre monde d’en bas pas du tien.

Il se redressa, piqué au vif, d’autant plus qu’il ne voyait pas de quoi elle parlait. Sa voix tonna :

— Comment oses-tu m’accuser ? Décidément, tu as oublié toutes les bonnes manières. Veux-tu t’expliquer ?

Elle ne lui avait jamais connu ce regard blessé. Se serait-elle trompée ?

Elle jeta un coup d’œil vers sa sœur qui semblait tout aussi surprise.

— Tu as bien envoyé Gertrude chez nous ?

Straurius haussa les sourcils et l’invita à continuer d’un geste.

— Tu n’es pas sans savoir qu’elle doit embrasser un humain pour retrouver sa véritable forme.

Elle sentit sa colère arriver avant qu’elle puisse terminer. Le vent se leva, les arbres se plièrent, elle entendit les cris des fées et des lutins qui occupés ne comprenaient pas d’où venait cette tempête. Isaulya tenta de calmer le sorcier, il l’arrêta d’un geste et sa voix tonna :

— Comment peux-tu imaginer une seconde que j’ai envoyé cette grenouille pour qu’elle te ravisse ton homme ? Comment as-tu pu concevoir que je monterai ce plan minable pour te ramener ici, parce que c’est ça que tu penses n’est-ce pas ?

Elle comprit son erreur à son regard. Elle l’avait blessé profondément, elle sentit sa peine.

— Je n’ai pas besoin de ce stratagème pour ça, l’aurais-tu oublié ? Si j’avais désiré que tu reviennes pour toujours, je n’ai qu’un geste à faire, ne le sais-tu pas ? Tu me déçois fortement Shearah. Tu n’es plus la sorcière que je connaissais, ton monde t’a changée et je n’aime pas du tout ce que tu es devenue.

Elle voulut l’interrompre, il ne lui en laissa pas le temps.

— Je vais régler cette affaire, et rapidement découvrir le coupable, crois-moi. Quant à toi, j’ai compris que tu avais trahi ta promesse. Ta fille sait qu’elle est une sorcière, elle devra donc revenir à chaque pleine lune pour suivre notre enseignement et si elle préfère rester ici, elle aura sa place. Elle est très forte, je veillerai à lui trouver le domaine qu’il lui convient. Quand elle aura 16 ans, elle choisira où elle veut vivre et tu n’auras rien à dire. Tu n’as rien respecté, Shearah, tant pis pour toi.

D’un revers de cape, il disparut.

**********

Gertrude se tenait aux pieds des enfants. Stefano la contemplait le cœur battant.

— Je ne suis pas si terrible, je te promets de ne pas tirer la langue, coassa la sorcière.

Dégouté, il s’essuya la bouche d’un revers de main. C’est alors que Straurius apparut.

Il attrapa aussitôt la grenouille et la souleva en l’air. Elle battit des pattes.

Il posa sa main sur la tête de Stefano, sourit à Héloïse qui le contemplait admirative, fixa un instant Joe avant de disparaitre, mais cela suffit pour que celui-ci intervienne et le retienne :

— Ne partez pas, ça peut peut-être s’arranger.

Straurius le regarda et le sonda. Cet homme était bon, dommage qu’il ne soit pas sorcier, il avait un cœur romanesque, il aurait pu accomplir de belles choses dans son monde.

Joe continua sur sa lancée, profitant du silence installé.

— Si cet… animal peut revenir un être humain, je veux bien l’embrasser. Je ne comprends pas bien vos histoires, mais je ne peux pas laisser cette… personne dans la peine.

Gertrude se sentit fondre de tendresse pour ce mortel qui n’avait rien demandé et se sacrifiait, enfin ce n’était pas un sacrifice parce que lorsqu’elle apparaitrait dans toute sa magnificence, il ne regretterait plus son choix. Elle suspendit son souffle, elle était toujours les pattes battant l’air, tenue par Straurius.

Héloïse tapa des mains et s’écria :

— Oh, papa Joe, tu es trop gentil.

Straurius hésita. Il regarda la grenouille, vit ses yeux globuleux le supplier. Il comprit que la punition avait assez duré, mais il restait un détail à régler.

© Isabelle-Marie d’Angèle (avril 2024).

À très vite…

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