Bonjour toi 😉

Quand il me prend l’idée d’écrire sur un chiffre, ici c’est le 5, voilà ce que ça donne. Quand je me relis, je me demande comment je fais pour avoir toute cette imagination. Je sais que le texte est un peu long mais va jusqu’au bout, je suis certaine que tu voudras connaitre la fin 😁 et je te rappelle que je suis très bavarde 😏.

Fleur en avait assez. Le chiffre cinq lui donnait la nausée. Tout tournait autour : sa naissance le 5 octobre d’où son prénom Fleur. Il fallait le porter ce prénom !

Mariée un cinq juillet avec Antoine, jour de sa fête. Cinq filles, deux fois des jumelles, et une toute seule, elle se demandait encore pourquoi aujourd’hui, toutes arrivées un cinq du mois : 5 novembre, Sylvie et Élisabeth, 5 février Agathe et Adélaïde, et Judith le 5 mai, et clin d’œil du calendrier, toutes le jour de leur fête. Cinq ans de mariage, habite au n° 5 de la rue des cinq sens. Ajouter à ça, qu’il fallait manger 5 fruits et 5 légumes, Fleur en avait ras la casquette..

Ce matin dans sa cuisine, après avoir conduit ses gamines à la maternelle et la petite dernière chez la nounou, elle souffla et se fit un café.

 Que se serait-il passé si le 5 n’existait pas ?  murmura-t-elle en se souriant dans le miroir en face d’elle.

— Je vois qu’on a besoin de moi.

Une voix grave venant du salon la fit sursauter.

— Qui est là ?

— Moi, vous m’avez appelé, me voici ! Mais aidez-moi à m’extirper de ce satané bouquin tout froissé.

Fleur avança prudemment, sa tasse à la main.

— C’est pour aujourd’hui ou pour demain ? s’énervait la voix.

Elle posa son café sur la table basse et s’approcha, souleva le livre abandonné et recula, effrayée. Un gigantesque homme bleu se déplia devant elle. Il lui était familier. Impossible ! Il ne pouvait pas être…

— Votre bon génie pour vous servir !

Fleur se laissa choir sur le divan, stupéfaite.

— Hé ! Ma p’tite dame, je n’ai pas que ça à faire moi, vous m’avez appelé, je suis là.

— Mais… Vous ne pouvez pas exister !

— Ah que si ! Touchez-moi donc !

— Et… votre lampe ? Quelle question idiote, j’avoue !

— Dépassé ça ma p’tite dame ! alors, votre vœu ? demanda-t-il en se frottant les mains.

— Un vœu ? Je n’ai qu’un vœu ?

Il éclata de rire.

— C’est bien ça les femmes, jamais contentes ! Je n’existe pas et finalement elles se disent Pourquoi pas ? Plusieurs vœux, ce serait bien ! Et bien non, c’est la crise, restriction budgétaire, un seul souhait !

Fleur n’en revenait toujours pas. Le génie dans son salon ! quand elle raconterait ça aux filles, personne ne la croirait et ils la prendraient pour une folle.

Il commençait à s’impatienter.

— Que vous demande-t-on d’habitude ?

— L’argent, être beau, un corps de rêve, tomber amoureux, la liste est longue.

— Et ça marche ?

— Ben oui, vous me prenez pour qui ? J’ai les diplômes, non, mais vous croyez qu’on recrute comme ça, vous ? Ils exigent des qualifications maintenant.

— Je ne savais pas qu’il y avait un diplôme Génie, génie civil, mécanique, je connais, mais génie tout court, je sèche !

— On va passer la journée à déblatérer sur la paperasse, c’est bien ma veine, il a fallu que je tombe sur une revendicatrice. Vous êtes syndiquée ?

— Non, non, ce n’est pas ça, mais je suis tellement surprise.

— J’ai compris, mais votre vœu, ça vient ?

— Je ne sais pas ce que je veux.

Il la regarda.

— En fait vous avez tout : argent, vous n’êtes pas moche, vous êtes amoureuse.

Il énumérait sur ses doigts en sifflotant.

— Pourquoi m’avez-vous appelé alors ?

— Je n’ai rien fait, j’ai parlé à voix haute.

— Un peu jeune non pour la maladie d’Alzheimer ?

— Mettez-vous un peu à ma place, un génie qui débarque dans mon salon ça n’arrive pas tous les jours.

— J’aimerais bien me mettre à votre place.

— Comment êtes-vous devenu génie ?

— Trop longue histoire.

— Pourquoi dîtes-vous que vous aimeriez être à ma place ?

— Vous m’avez bien regardé ? Je suis gros et bleu ! Vous êtes toute jolie, et vous êtes une femme, j’aurais aimé être une femme.

— Vous avez toujours été génie ?

Fleur s’était assise sur le canapé et bavardait naturellement avec le génie sorti du livre de sa fille. Lui se déplaçait en survolant les chaises, les fauteuils, les meubles. Elle le suivait du regard, ébahie.

— Voulez-vous du café ?

Elle se saisit de sa tasse et partit vers la cuisine. Il lui emboita le pas.

— Je ne bois pas, je ne mange pas. Je ne peux pas !

— C’est triste non ?

— On s’y fait !

Fleur se resservit du café, il était encore chaud.

— Alors votre vœu ? Franchement, je n’ai pas que ça à faire.

— J’aimerais que le chiffre cinq disparaisse !

Il manqua s’étouffer, vira au rouge, se dégonfla, se regonfla, bomba le torse :

— On ne me l’avait jamais faite celle-là ! Vous êtes certaine de ce que vous voulez ? C’est bizarre comme demande, mais si c’est ça votre vœu, allons-y !

Il enfla comme une tornade et s’envola.

Seule dans sa cuisine, Fleur buvait son café.

On sonna à la porte. C’était le facteur.

— Bonjour, madame, qu’est-il arrivé à votre numéro ? Encore un coup de ces petits chenapans, je l’avais dit qu’il fallait les surveiller, mais on me répond il faut bien que jeunesse se fasse !  voilà le résultat. Vous préviendrez votre mari, il va être content !

Fleur dévisageait avec stupeur l’homme en face d’elle.

— Vous êtes toute pâle, ça ne va pas ?

— Je pensais que vous aviez été muté.

Il éclata de rire.

— J’ai déposé mon dossier, il y a juste un mois, vous connaissez la lenteur de l’administration, et puis il manque encore un papier.

— Mais hier, votre collègue… balbutia Fleur

— Vous allez bien, madame ?

Le facteur la dévisageait, inquiet.

— Je fais toujours la même tournée depuis plusieurs années quand même, on croit connaître les gens, mais finalement, on se trompe, bougonna-t-il. Pensez à votre numéro, vous n’êtes plus en règle là.

Il enfourcha son vélo et disparut au coin de la rue laissant Fleur abasourdie.

Son portable sonna.

— Chérie, tu t’occupes des enfants, mon rendez-vous dure plus longtemps que prévu, je risque d’être en retard.

— Mais Antoine, tu…

— Antoine ?

Silence au bout du fil.

— Fleur, tu es toujours là ? C’est Florent à l’appareil, ne me dis pas qu’Antoine qui t’appelle ma chérie est revenu ?

Il raccrocha.

Florent ? Fleur regarda sa pendule. Nom de nom, plus de chiffre 5. Elle s’empara du calendrier. Plus de 5. Donc Antoine né le 5 juillet n’existait pas. Ah, mais Florent oui, le 4.

— Qu’est-ce que j’ai fait ?

Elle se mit à crier et à appeler partout dans la maison  :

— Génie, je me suis trompée. Je n’ai pas répondu à la question, si c’était vraiment mon vœu, ça ne compte pas, revenez, je vous en prie.

Elle éclata en sanglots, tapa du pied, s’arracha les cheveux, la crise de nerfs n’était pas loin. Elle chercha le livre abandonné sur le divan, il avait disparu. Elle grimpa quatre à quatre dans la chambre des enfants et respira mieux, les lits, les jouets étaient toujours en bazar.

Ne sachant plus quelle heure il était, elle redescendit l’escalier, bondit hors de la maison, monta dans son minibus et fila vers la maternelle. Un attroupement devant l’école la rassura, elle n’était pas en retard, le portail s’ouvrait. Après avoir garé sa voiture, elle s’engouffra dans le hall, essayant d’éviter les mamans qui la connaissaient, pressée de retrouver ses filles.

— Ohé Fleur, tu es distraite ! La classe de tes gamines, c’est là, moyenne section, je sais bien qu’elles sont en avance, mais quand même !

La mauvaise copine, celle qui est au courant de tout sur tout, qui voit tout, l’apostropha, mais la jeune femme ne lui répondit pas et fixa la liste des élèves affichée sur la porte : Pas de Sylvie ni d’Élisabeth, mais Charline et Jessy nées le 4 novembre. Elle pâlit devant les mines bien connues des petites qui se jetaient dans ses bras en criant :

— Maman, Maman, vite on va chercher Véro et Bérénice.

 Fleur se laissa emporter par ses deux gamines de quatre ans dans la classe d’à côté. Même scénario : un œil sur la liste, Véronique et Bérénice, nées le 4 février. Quatre fillettes de prénoms inconnus pour elle, un cauchemar, mais pas pour ses pitchounettes qui tendaient bras, bonnets, écharpes, sacs et doudous, la routine quoi ! Mais qui était qui ? Visages identiques comme ce matin pourtant, réfléchis Fleur, tu es leur maman quand même ! La jeune femme se sermonnait intérieurement.

Elles montèrent toutes dans le minibus, Fleur les attacha. Elles babillaient comme d’habitude.

— Tu as préparé quoi pour le goûter ?

— Attendez les filles, on va chercher Judith, votre petite…

— C’est qui ?

Quatre voix à l’unisson la firent piler net au milieu de la route. Un coup de klaxon furieux résonna, elle sursauta. Fleur réalisa alors avec horreur l’étendue de sa bêtise. On ne pouvait pas changer le monde comme ça d’un coup de baguette magique. Sa petite fille, son bébé, n’existait pas, elle n’était pas née, mais naîtrait-elle un jour ? La question pour l’instant n’avait pas lieu d’être, elle avait des priorités bien plus urgentes. Le cours de sa vie avait pris un tournant différent.

— Pourquoi tu pleures ?

Ses quatre fillettes, inquiètes, la fixaient dans le rétroviseur.

— Je ne pleure pas, allez on rentre à la maison.

Devant chez elle, elle réussit à plaisanter en les détachant, l’une après l’autre.

— Papa, papa…

Fleur n’osait pas se retourner. Son mari était déjà rentré. Les filles par contre, ravies, lui sautaient dans les bras.

— On va goûter maman ?

Une petite main se glissait dans la sienne et la serrait contre sa joue.

— Oui, oui, j’arrive.

— Laissez maman. Rentrez à la maison, rangez vos affaires nous arrivons ! Florent s’approchait de sa femme qui n’osait pas le regarder. Quand elle leva les yeux, elle vit son mari — Dieu soit loué, c’était le même homme que ce matin — mais il avait sa tête des mauvais jours.

— Tu peux me dire ce qu’il se passe ?

— Je…

— Je comprends que tu sois fatiguée, demain c’est samedi, je m’occupe de tout, et…

— Vendredi

— Pardon ?

— Demain, on est vendredi.

— Je n’en connais qu’un de vendredi, c’est l’ami de Robinson, demain on est samedi. Enfin Fleur, tu ne vas pas bien, après jeudi, c’est samedi, ça a toujours été comme ça !

Fleur regarda son mari, éperdue.

— Tu me parles d’Antoine ?

Elle l’avait oublié celui-là !

— Il est revenu, je le savais !

— Mais de qui tu parles ?

— Antoine ! Il est revenu ?

— Mais non !

Florent haussa les épaules et entra dans la maison. Les filles piaffaient d’impatience :

— Le goûter, le goûter !

— Tu es rentré bien tôt. Je croyais que…

— J’ai abrégé ma réunion. Ton Antoine m’a perturbé.

— Je t’assure que…

— Il était là ce matin, pas vrai ? Sinon, tu expliques pourquoi tu m’aurais appelé Antoine ?

Fleur préféra ne pas répondre et commença à sortir du réfrigérateur, yaourts, compotes, devant ses filles. Si en plus, son ex, Antoine revenait, alors, c’était la catastrophe !

— Vous êtes contente ?

Fleur se retourna.

— Vous rendez-vous compte du bazar que vous avez provoqué ? À cause de vous, plus de RTT le vendredi, on est repassé aux 39 heures, j’ai tous les syndicats sur le dos en plus d’un avertissement. Il paraît que j’aurais dû refuser votre demande. Ohé, la p’tite dame, on se réveille, je vous parle !

Fleur regardait autour d’elle. Arrêt sur image comme à la télé : Florent, bras tendu pour attraper une bouteille de jus de fruits, ses filles muettes pour une fois, assises à la table.

— Je suis désolée. Mais… iIs vont redevenir comme avant n’est-ce pas ?

— Elle est désolée, mima le génie, non, mais je rêve ! On fait quoi, là, maintenant ? Oui, ne vous inquiétez pas, ils ne se souviendront de rien pour répondre à votre question.

— On peut revenir en arrière ? Vous aviez l’air tout gentil ce matin.

— Ben voyons, vous n’aviez droit qu’à un vœu, je vous rappelle.

— Il ne compte pas, je n’avais pas donné mon accord.

— Elle est bien bonne celle-là !

— C’est vrai, vous avez dit : vous êtes certaine de ce que vous voulez ? C’est bizarre comme demande, mais si c’est ça votre vœu, allons-y  et vous avez disparu.

Le génie sortit de nulle part une tablette et fit défiler les images. Fleur regardait par-dessus son épaule.

— Tst, tst, secret défense ! On ne copie pas. Curieuse en plus !

Il rangea sa tablette.

— Okay, j’ai fait une erreur.

— Ah vous voyez que j’avais raison !

Le génie se gratta la tête.

— C’est que… Il faut que ça passe en conseil, je ne peux pas décider tout seul.

— Vous êtes mon bon génie non ?

— Heu oui… mais stagiaire ! En fait, je n’aurais pas dû venir tout seul et intervenir sans mon tuteur, mais il était occupé ailleurs.

— Vous avez voulu faire du zèle, c’est malin !

Le génie se mit alors à pleurer et de grosses larmes bleues roulèrent sur ses joues. Fleur ne savait plus quoi faire. C’est alors que Florent et les filles se remirent en mouvement :

— C’est qui lui ? demanda Jessy en pointant son doigt vers le génie.

— Tu es le génie d’Aladin ? Tu vois que ça existe.

Bérénice se mit à l’embrasser et l’attraper par le cou. Ses sœurs se joignirent à elle pour faire la ronde. Celui-ci leva les yeux au ciel, il ne comprenait plus rien. Normalement, seule Fleur devait connaitre son existence, il avait vraiment dérapé. Il allait se faire virer, c’était certain ! En tout cas, il profitait de l’aubaine et dansait avec les petites, c’était toujours ça de pris ! Elle n’était pas facile la vie de génie ! Quoiqu’on en pense !

Florent, les yeux écarquillés, regardait ébahi ses filles avec une tornade bleue.

— Tu m’expliques ?

Et Fleur raconta, le ras-le-bol, le chiffre cinq.

— Arrête tes bêtises Fleur, un génie ça n’existe pas, et…

— La preuve !

— Laisse-moi continuer. Tu me parles de cinq, je ne comprends rien de ce que tu me racontes.

— Évidemment.

— Quoi évidemment ? Tu te moques de moi en plus ?

— Le chiffre 5 a disparu, tu ne peux pas le connaître.

 Elle éclata de rire, mais c’était nerveux et son mari n’avait pas l’air d’apprécier.

Ils ne s’en sortiraient jamais et Fleur ne parla même pas de leur petite Judith.

— On en fait quoi de lui ? demanda Florent en désignant le bonhomme bleu.

Un cri unanime de ses filles :

— Il reste avec nous !

— Dis oui maman !

— Dis oui maman, répéta le génie en sautant de plus en plus haut au grand plaisir des jumelles.

Une fois revenu au sol et tenu par la main, les enfants imploraient les parents du regard. La situation échappait complètement à Fleur.

— J’ai peut-être la solution.

Nouvel arrêt sur image. Fleur sentait la migraine monter.

— Vous venez avec moi, vous expliquez au chef ce qui s’est passé et on verra bien si votre histoire est acceptée. Je vous préviens, ce n’est pas un facile le chef !

— Où devrais-je aller avec vous ?

— Au pays des génies pardi !

— Excusez-moi, je n’ai pas vraiment l’habitude de discuter avec un génie tous les jours.

Fleur commençait à s’énerver.

— Elle raisonne en plus ! Elle me met dans une panade pas possible et elle la ramène. S’il vous plait, je veux vous aider et moi aussi par la même occasion.

Il était pathétique, les coudes sur les genoux dodelinant de la tête.

— Pendant combien de temps ?

— Le temps n’existe pas dans mon pays.

— Et ma famille ? Comment va-t-elle réagir en mon absence ? Qui va s’occuper des enfants ?

— Ne vous en faites pas pour ça, personne n’est indispensable, vous le savez bien.

— Merci, sympa.

Fleur ne savait pas quoi faire.

— Pressez-vous maintenant, je ne vais bientôt plus pouvoir agir !

Fleur haussa les épaules, elle n’avait pas le choix, il fallait bien que tout ça s’arrange. Tout était arrivé par sa faute, à elle de réparer. Elle joignit sa main à celle du génie.

On tambourinait à la porte.

Fleur était dans sa cuisine, une tasse de café à la main. Elle se leva et posa le mug sur le plan de travail, c’était le facteur.

— Votre courrier. Une signature, là !

Elle le regarda, c’était l’homme habituel. Elle n’osa pas lui parler, il avait l’air de mauvaise humeur. C’est vrai qu’elle ne l’avait pas reconnu, l’autre jour. En fait c’était quand ? Mais…

après son départ, elle courut dans la chambre de ses filles. Tout était normal. Elle vérifia les photographies, cinq filles ! Elle vérifia sa montre et respira d’aise. Elle avait rêvé. C’était tellement réel quand même. Elle sourit et se dit que la vie était belle finalement et quelle idée saugrenue elle avait eue. Au fait, c’était quand ? Ce matin ? Elle s’y perdait un peu.

À nouveau son portable. Elle redescendit l’escalier.

— Chérie, c’est moi, pourrais-tu récupérer les filles, je suis retenu au boulot par une réunion imprévue ?

— Oui, oui.

— Merci chérie et à ce soir.

Perplexe, Fleur avait une sensation de déjà-vu. Elle posa son téléphone et regarda une fois encore l’heure. Elle avait un peu de temps avant de partir chercher les enfants. Elle jeta alors un œil sur le recommandé et se demanda ce que cela pouvait être. Elle déchira l’enveloppe.

— C’est une blague ?

— Pas du tout, Fleur. Il y a votre signature là en bas du document. C’est un contrat en bonne et due forme que vous avez accepté afin d’annuler le vœu précédent, accordé par excès de zèle de votre génie en formation. Vous êtes nommée Génie 5e classe et vous devrez intervenir cinq fois pour réaliser cinq vœux en cinq mois.

L’homme en face d’elle était apparu dès l’ouverture du courrier.

— C’est normal que vous ne vous rappeliez de rien, mais je vous certifie que c’est bien votre signature.

— Qui êtes-vous ? Où est mon génie ?

— Je suis le chef de…

— Ah oui, le chef pas facile !

— Pardon ?

— Oubliez ce que j’ai dit. Donc, vous êtes le grand chef de tous les génies, au pays des génies.

— Je comprends que vous ayez du mal à y croire, c’est pourtant vrai.

— Je vais avoir droit à une formation ?

— Vous l’avez déjà eue !

— Je ne m’en rappelle pas.

— Ne vous inquiétez pas, quand ça sera le moment, vous vous en souviendrez.

— Mais je ne suis pas un génie moi !

— J’ai bien cru que tu n’allais jamais la dire cette satanée phrase ! Mais si ma chérie, tu es mon génie à moi, bravo ! bravo ! tu as participé au jeu Une idée de génie.

Fleur abasourdie regarda son salon envahi peu à peu de techniciens et cameramen qui applaudissaient en riant et venaient la féliciter et l’embrasser. Son mari lui tendait les bras, elle s’y blottit sans trop comprendre encore ce qui se passait. N’était-il pas au bureau ?

— Tu es super jolie maman.

— Tu as vu, moi aussi je suis à la télé.

Les fillettes étaient très excitées devant le petit écran. L’émission venait d’être diffusée et bien sûr avait été enregistrée afin de la passer et repasser en boucle, c’était le début de la gloire croyaient-elles.

Fleur commentait :

— C’est bien filmé, j’avoue ne m’être aperçue de rien, des vrais professionnels ! Mais quand même Antoine, il a fallu que les maîtresses à l’école soient dans le coup pour que les prénoms des filles aient été changés, la panique quand j’ai découvert des noms différents ! D’ailleurs, je n’ai pas vu cette séquence, peut-être que ce n’était pas terrible surtout avec l’intervention de la commère de service. Ah ! elle aurait été ravie, elle, de passer à la télé. Elle aurait débarqué ici, aurait minaudé et fait sa belle.

— De quoi parles-tu ? demanda son mari, surpris. N’exagère pas, on a tourné seulement dans la maison, tu n’imagines pas tout le stress pour que tu ne te rendes compte de rien.

— Hum, Hum, tu ne veux pas tout me dire, je comprends.

Fleur attrapa alors le livre d’Aladin qui allait glisser sur le tapis. Elle l’ouvrit et reçut en plein visage le clin d’œil du génie articulant qui est le génie finalement ?

© Isabelle-Marie d’Angèle (septembre 2024).

9 réflexions sur “Une idée de génie

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