Chapitre 5
Léonie rougit jusqu’à la racine de cheveux alors que Mariette lâchait un OH ! de surprise.
Josette Castillo et Amélie Pardout se turent. Josette s’en voulait d’avoir mis mal à l’aise Léonie. Elle hésita puis tapa un SMS qu’elle envoya rapidement pour éviter de changer d’avis.
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Jonathan Playelle était seul face à son écran géant. La voix impersonnelle de Cupidonetmoi.com résonna.
— Tu es en colère Jonathan !
— Arrête de parler comme si tu étais humaine. Tu n’es qu’une application.
— Je suis d’accord avec toi, je suis une application qui rassemble les âmes sœurs. Grâce à toi et au téléchargement, je peux écouter maintenant leurs conversations. Je suis dans leur téléphone. J’entends tout et enregistre. Par exemple, aujourd’hui, je sais que Léandre et Léonie vont se revoir.
— Ils habitent à quelques kilomètres l’un de l’autre, c’est contraire à notre principe.
— Le principe dont tu parles est obsolète et idiot.
— Je te remercie du compliment.
— Ne sois pas fâché. Tu m’as créé, à mon tour de te donner des conseils.
L’écran s’éteignit, signalant la fin de la conversation.
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— Mon fils va arriver. Puis-je attendre ici ?
Léonie hocha la tête. Josette restait la seule cliente. Mariette en profita pour sortir acheter son déjeuner. Les deux femmes ne pipaient mot. Josette la première rompit le silence.
— Je suis désolée pour tout à l’heure.
— De quoi parlez-vous ?
— De Rosalie.
Léonie haussa les épaules et ne répondit pas. Elle aperçut Léandre qui se garait devant son salon. Il descendit de son 4×4 et poussa la porte. Il complimenta sa mère pour sa coupe. Celle-ci enchaina immédiatement.
— Figure-toi que nous avons discuté de toi tout à l’heure.
Léonie aurait préféré que la conversation s’arrête, mais Josette continua sur sa lancée.
— Et de ta vache !
Léandre sourit et Léonie remarqua que son sourire atteignait ses yeux. Qu’il était beau ! Josette n’en resta pas là. Quand elle avait une idée derrière la tête, rien ne l’a dissuadait de continuer.
— Je vais acheter le pain à la boulangerie, discutez sans moi.
Stupéfait, Léandre se tourna vers Léonie ne sachant que dire.
— Veuillez l’excuser ! je ne comprends pas. Je n’ai rien de particulier à vous dire. Je vais l’attendre dans la voiture.
Il allait sortir quand Léonie l’interpella.
— Vous l’aimez vraiment beaucoup votre vache à ce qu’il parait. Votre mère parlait d’elle en l’appelant par son prénom, Rosalie, je crois.
Léonie raconta alors la discussion qui avait fait beaucoup glousser ses clientes. Léandre rit de bon cœur, lui aussi.
— Rosalie est une vache que je possède depuis qu’elle est née, d’accord, mais elle ne régente pas ma vie. Si vous la rencontriez, peut-être vous plairait-elle.
Léonie secoua la tête.
— Non merci ! les animaux, la ferme tout ça, ce n’est pas mon truc.
Mariette qui revenait avec son déjeuner entendit la fin de la phrase. Elle fit les gros yeux à son amie et s’immisça dans leur conversation.
— Encore vous ? Décidément, on ne se quitte plus. Léonie dit qu’elle n’aime pas les bêtes, mais elle raconte n’importe quoi. Elle a un chat et si elle le pouvait, elle achèterait aussi un chien.
Léandre ne releva pas. Sa mère l’attendait devant la voiture, il les salua et s’en alla la rejoindre.
Mariette s’emporta.
— Qu’est-ce qui t’a pris de balancer des fadaises ? J’ai bien vu ce matin qu’il te plaisait ce mec !
— Un fermier ? Tu rêves !
— Je parie que s’il participait à l’émission L’amour est dans le pré il aurait des sacs de courrier à ne plus savoir qu’en faire.
Léonie haussa les épaules et pensa que même s’il était beau gosse, elle le laissait à sa Rosalie. Les odeurs de grange et de fumier, ce n’était pas pour elle.
Sur le chemin du retour, Léandre tenait un discours différent.
— Tu n’as rien trouvé de mieux à faire que de me jeter dans les bras de cette coiffeuse ? Pour ta gouverne, apprends qu’elle n’aime pas les agriculteurs.
— Qu’en sais-tu ?
— Elle me l’a dit.
— Souvent Femme varie. C’est bien connu !
Un message apparut sur l’écran. Josette qui ne maitrisait pas le Bluetooth s’insurgea :
— Qu’est-ce que c’est encore ?
Curieuse, elle découvrit :
— Tu t’es inscrit à une application de rencontres ?
— N’importe quoi !
— Si regarde ! Je te lis Bravo, vous avez réussi votre premier rendez-vous. Vous êtes sur le chemin du bonheur. Cupidonetmoi.com.
— Putain ! il l’a fait le bougre ! Il le savait pourtant que je n’étais pas d’accord !
— De quoi parles-tu ?
— Marc ! C’est lui qui m’a inscrit.
— C’est une bonne idée, je le féliciterai dès que je verrai. Mais de quelle rencontre s’agit-il ?
Elle regarda son fils.
— Ne me dis pas que toi et la coiffeuse ? Tu m’as bien eue !
— Tu te fais des films, je n’ai eu aucun rendez-vous !
— Tu m’en diras tant ! Quand ton père saura ça !
Léandre tapa sur le volant.
— Tu ne racontes rien, parce qu’il n’y a rien. OK ? Ah ! il va m’entendre, Marc !
Arrivé à la ferme, il freina brusquement et sortit de son véhicule, très remonté après son ami.
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Léonie et Mariette déjeunaient ensemble quand le bip d’un SMS retentit sur le portable de Léonie.
— C’est un message de l’application Cupidonetmoi.com.
— Fais voir !
Mariette lut à haute voix.
— Bravo, vous avez réussi votre première rencontre. Vous êtes sur le chemin du bonheur. Cupidonetmoi.com. Mais de quelle rencontre parle-t-elle ?
— Je n’en sais rien. Je n’ai pas été convoquée à un… speed dating, c’est ça ?
— Tu n’as pas loupé un truc ?
— Mais non ! Tu vois, cette application ne fonctionne pas. Elle envoie des messages comme ça à tous ses clients, mais elle ne les suit pas. C’est du bidon !
Mariette qui ne lâchait rien rétorqua en lui faisant un clin d’œil.
— Peut-être que le rendez-vous était avec ton agriculteur ?
— Mais ce n’était pas un rendez-vous ! Et puis franchement, tu me vois avec lui ?
— Pourquoi pas ? Qu’est-ce qui te gêne ? Ses combinaisons vertes ? Sa vache ? Son parfum ? Je te garantis qu’il ne sentait pas le fumier. Je parierais même pour un Giorgio Armani.
— Jamais je ne craquerais pour lui. Je n’ai pas envie de me réveiller au chant du coq.
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C’est Marc qui appela le premier Léandre.
— Ce n’est pas une bonne idée qu’a eue le maire ? Organiser une journée découverte en juin, avec tous les métiers des habitants de la commune. Elle se terminera par un pique-nique géant. La première réunion est ce vendredi. Tu viendras ?
— Tu tombes bien toi ! Je voulais justement te parler.
— Plus tard ! On s’inscrit ? La reconnaissance de notre travail enfin !
Gagné par la bonne humeur de son ami, Léandre donna son accord.
Léonie était à nouveau pied d’œuvre quand un jeune garçon distributeur de prospectus entra dans le salon et lui en laissa un. Elle le parcourut des yeux.
— Tu vas y aller ? demanda Mariette
— Je peux m’inscrire et décider ensuite. Une journée de découvertes, pourquoi pas ?
Jonathan Playelle face à son écran géant écoutait la voix qui fredonnait :
— C’est un beau roman, c’est une belle histoire…
À suivre …