Romance : Cupidonetmoi.com

Chapitre 3

Le jour suivant, Léonie mit un point d’honneur à ouvrir son salon plus tôt que d’habitude. Elle en profita pour rechercher les grains de poussière. Les cheveux coupés avaient la fâcheuse habitude de se cacher partout. Un bip sur son portable la prévint qu’un message venait d’apparaitre.

Mariette arriva à ce moment-là et les deux amies s’embrassèrent.

— Tu es bien matinale, ma jolie !

Mariette enleva son manteau et l’accrocha dans la penderie réservée à cet effet.

— Je pensais ouvrir avant toi et te faire la surprise de t’apporter le croissant tout chaud de chez Chris et son fournil mais je vois que tu m’as devancée. Qu’est-ce que tu regardes ? demanda-t-elle, curieuse.

— Une pub que je viens de recevoir.

— Montre !

Elle se pencha sur l’écran de Léonie.

— Tu t’intéresses à l’agriculture maintenant ? Remarque, il est beau gosse le mec !

En effet, un homme habillé d’une combinaison verte à la fermeture éclair blanche posait à côté d’une énorme vache à la robe claire. Comme Léonie ne répondait toujours pas, Mariette lui mit la viennoiserie sous le nez.

— Je prépare le café ? On va le prendre en haut ! Je ferme la porte à clé, il reste un quart d’heure avant l’ouverture.

Elle regarda le planning et dit :

— Les deux premières clientes arrivent plus tard, nous avons le temps. Tu viens ?

Léonie sortit de sa léthargie et la suivit.

— Merci pour le croissant.

— Je t’ai connue plus bavarde !

Mariette ne s’offusqua pas davantage du silence de son amie et monta l’escalier qui menait à son appartement.

— C’est cette photo qui te turlupine ? demanda Mariette en disposant les mugs sur le comptoir de la cuisine américaine.

— Je ne comprends pas pourquoi elle est apparue sur mon écran. Je n’ai pas fait de recherches sur les vaches ou le lait.

— C’est juste un spam, reprit Mariette. Tu ne vas pas te mettre des nœuds au cerveau ! C’est le beau gosse qui te plait.

— Moi avec un agriculteur ?

— Qu’as-tu contre eux ?

— Rien de particulier, mais avant que je craque pour un homme qui garde des ruminants, les poules auront des dents.

— Joli ! tu vois es déjà dans l’ambiance petite maison dans la prairie, remarqua Mariette en riant.

Léonie se joignit à elle en croquant dans son croissant. Puis elle jeta un coup d’œil à la pendule murale et s’écria :

— Pour finir, nous allons être en retard ! Hop ! au boulot !

****

Cette fois-ci, Léandre Castillo n’avait pas loupé l’heure et ses vaches étaient sorties dans le pré. Son père l’invita à venir prendre le petit déjeuner chez lui. Sa mère, Josette, était à pied d’œuvre et un pot-au-feu mijotait déjà. La bonne odeur des légumes qui bouillonnaient le cueillit dès qu’il entra.

— Bonjour maman !

Elle tendit sa joue et sourit.

— Je me suis mise en avance. Pourrais-tu m’emmener en ville ? Ton père ne peut pas, il a besoin de la voiture. Je le soupçonne de le faire exprès d’ailleurs.

Francis Castillo s’attabla et maugréa :

— Je ne sais pas ce qu’elle a depuis ce matin. Elle a reçu un message sur son téléphone qui vante l’ouverture d’un nouveau magasin et elle a décidé d’aller en même temps se faire belle.

— Pourquoi la critiques-tu, papa ? Elle n’a pas beaucoup l’occasion de sortir. Pour une fois qu’elle en émet l’envie, laisse-la faire. Donne-moi ton heure et je t’y conduirais.

Léandre versait le café dans les bols. Il attrapa une tranche de pain et la tartina de confiture de prunes.

— La confiture c’est pour les filles, remarqua son père ! Prends du boudin !

Josette vint les rejoindre et glissa son portable vers Léandre.

— Regarde, tu pourrais peut-être trouver ton bonheur là !

Léandre se pencha sur la publicité et haussa les épaules.

— Une boutique de vêtements ! Tu rigoles ? Je ne te plais pas habillé comme ça ?

Il regarda mieux.

— Quelque chose t’intéresse ? demanda Francis en découpant un morceau de charcuterie.

Il ne répondit pas, hypnotisé par l’image face à lui. Il interrogea sa mère.

— Qu’est-ce que fait Rosalie sur ton portable ?

— Pardon ?

Josette ajusta ses lunettes.

— C’est une vache !

— Non ! c’est MA vache ! Peux-tu m’expliquer pourquoi elle est placardée sur la vitrine d’un coiffeur ?

Francis éclata de rire. Le couple se regarda. Ils sentaient la mauvaise humeur de leur fils grimper.

— Dans une demi-heure, ça te va Léandre ?

Comme il ne répondait pas, Josette répéta sa question.

— Tu m’écoutes ?

Elle avait posé sa main sur son bras. Il leva la tête et grommela :

— Je vais me changer et je vais la trouver cette boutique ! Encore un coup contre nous les agriculteurs !

Il les planta là. Francis murmura :

— Depuis quand s’habille-t-il autrement pour juste t’emmener en ville ?

Elle montra la photo à son mari.

— Tu la reconnais toi la Rosalie ? C’est sûr qu’il va être en colère si c’est elle !

****

Alice Colargol, assise face à son ordinateur, consultait ses fiches.

— Jonathan, il y a un problème.

La voix virtuelle répondit à sa place.

— Non, Alice, il n’y a pas de problème.

— Le couple que tu viens de réunir ne pourra jamais s’entendre, c’est insensé !

— Je suis programmée pour choisir les âmes sœurs. Je ne me trompe jamais.

— Tu peux laisser parler Jonathan s’il te plait ?

Alice s’énervait parce qu’elle avait l’impression de ne plus maitriser l’application depuis la coupure d’électricité de l’autre jour.

Jonathan tenta de la calmer.

— Pourquoi penses-tu que ce couple ne peut pas fonctionner ?

— Je ne me trompe jamais. Cupidoneetmoi.com est la meilleure application de rencontres. Je sais ce que je dis, je ne me trompe jamais. Vous allez me mettre en colère. Jonathan, fais quelque chose. J’ai chaud !

L’ordinateur se mit à clignoter. Alice regarda son informaticien.

— Tu comprends bien qu’elle n’est pas normale ? Elle répète sans arrêt les mêmes phrases.

Il entra de nouvelles données, mais rien n’y fit. Il regarda sa directrice et haussa les épaules.

— Laisse-la faire. Finalement, je suis content d’avoir réussi à créer une application qui devient indépendante.

— Mais enfin Jonathan, nous allons perdre toute crédibilité face à nos clients.

— Il n’y a pas mort d’homme non plus, Alice !

— Je ne suis pas programmée pour faire mourir les gens, reprit la voix, mais pour rassembler deux cœurs solitaires. Cupidonetmoi.com c’est l’amour assuré. C’est toi qui l’as dit !

Alice se laissa aller dans son fauteuil en soupirant tandis que Jonathan se frottait les mains. Il voyait déjà les gros titres des journaux Un jeune développeur crée une machine révolutionnaire. Il allait devenir riche, il le sentait.

La voix reprit, calmant aussitôt ses ardeurs.

— Je suis programmée pour faire le bonheur. Le malheur n’existe pas dans mon ADN. Je sais à quoi tu penses, oublie !

Jonathan comprit l’avertissement. L’ordinateur face à lui s’éteignit.

— Qu’est-ce qu’elle voulait dire encore ? gémit Alice.

— Rien, ne t’inquiète pas !

Alice saisit les deux fiches que l’imprimante avait sorties. Perplexe, elle contempla la vache qui la regardait d’un air bravache. Qu’est-ce que cet animal faisait dans la machine ?

À suivre…

Romance : Cupidonetmoi.com

Chapitre 2

Marc Agosta descendit de son tracteur alors que Léandre sortait de sa grange.

— Salut l’ami !

Les deux hommes qui avaient fait leurs études agricoles ensemble se connaissaient depuis longtemps. Marc avait repris l’exploitation de ses parents plus spécialisée en céréales, alors que Léandre avait préféré s’occuper d’animaux.

— Tu m’offres un café ?

Marc, un rouquin à la tignasse emmêlée et toujours coiffée d’un béret, était souvent de bonne humeur. Quelques ridules d’expression apparaissaient d’ailleurs au coin de ses yeux verts plissés à cause du sourire qu’il affichait.

— Je suis à la bourre mon pauvre ! Mon réveil n’a pas sonné ! Mais je peux quand même t’offrir ton kawa du matin.

— À la bonne heure ! Je voudrais te parler de quelque chose.

— Allez entre !

Léandre s’effaça pour laisser entrer son ami. La familière odeur du café se répandait dans la salle aux tommettes rouges.

— Il fait toujours bon chez toi ! Dommage que tu vives tout seul.

Il promena son regard sur la pièce d’assez grandes proportions. Une cheminée faisait face à la table en chêne encadrée de deux bancs. Une cuisine fonctionnelle et dernier cri n’avait rien à envier à celle des chefs de restaurant. Léandre profitait de son peu de temps libre pour confectionner des petits plats. Il adorait ça et prenait plaisir à recevoir ses amis. Certes, il était célibataire, mais il ne vivait pas reclus dans sa maison. Sa sœur était la première à les goûter et à le féliciter. Clothilde avait des jumeaux, Clémence et Baptiste, âgés de huit ans. Ils aimaient venir passer des vacances chez leur oncle et par la même occasion chez leurs grands-parents.

— Ah tu ne vas pas recommencer, soupira Léandre, en sortant les bols de son buffet.

— Toutes les filles ne se ressemblent pas, tu sais. Ce n’est pas parce que ta Carlotta a changé d’avis qu’elles sont toutes pareilles.

— Enfin, elle avait quand même fait les mêmes études que moi et nous avions beaucoup de projets en commun.

— D’accord, l’odeur de ta Rosalie a pu l’indisposer. Avoue que ta vache est trop familière avec toi !

— Ce n’est pas de ma faute si elle n’aimait pas Charlotte. Elle a senti avant moi qu’elle n’était pas faite pour moi !

Tout en parlant, il versait le café dans les bols rouges.

— Tu n’avais pas quelque chose à me dire ? Si c’est pour la réunion des agriculteurs du village, j’irais si le maire ne la plante pas à 18 h. A-t-on idée aussi ! à cette heure-là, comment veux-tu que je sois libre ? Et les collègues ?

Il haussa les épaules. Il était un des seuls à avoir une exploitation de vaches laitières. Les autres pouvaient plus facilement se libérer, alors que lui, ses animaux connaissaient l’heure et pas moyen d’y déroger.

— Non, il s’agit d’autre chose.

Marc sortit son portable.

— Regarde ! J’ai trouvé un nouveau site de rencontres.

Léandre éclata de rire.

— Quand tu as une idée en tête toi !

— Elle n’est pas comme les autres. Tu rentres un pseudo.

Léandre l’interrompit.

— Comme les autres !

— Attends, je n’ai pas fini. Ton véritable nom est enregistré. Tu ajoutes ton adresse.

— Ben voyons pour que toutes les filles du coin apprennent que je cherche une femme.

— Justement, non ! Tes coordonnées sont rentrées dans la machine et c’est tout.

— Comment ça, c’est tout ?

— L’application sait donc que tu cherches une âme sœur et elle va la trouver pour toi.

— Ah oui ? Comme ça ? Elle saura sans savoir si j’aime les brunes, les blondes, les petites, les vieilles ?

— De toute façon, elle prospectera dans une autre région, c’est écrit. De cette façon, toi comme l’heureuse élue, vous devrez vous déplacer pour vous rencontrer.

— C’est ça, je vais faire des kilomètres pour voir une fille qui ne me plaira pas et la semaine d’après je recommencerai. C’est vrai que je n’ai que ça à faire.

À ce moment précis, la tête de Rosalie cogna contre la vitre.

— Non, mais regarde-là celle-là !

Léandre éclata de rire alors que son père entrait dans la cuisine.

— Elle te cherche mon garçon. Tu sais bien que c’est toi qui l’emmènes au pré ! Bonjour Marc !

Francis Castillo lui serra la main. Alors que Marc demandait :

— Alors je t’inscris ?

Francis interrogeait son fils du regard en lui montrant Rosalie.

— Oui c’est bon !

Il suivit son père. Rosalie sur les talons.

Marc pensa que la réponse était pour lui et tapa entrée sur son téléphone.

Dans le salon de coiffure de Léonie, les bavardages allaient bon train.

— Berthe a enfin trouvé chaussure à son pied.

— Ah bon ? Elle en aura mis du temps. Qui est l’heureux élu ?

La dame aux bigoudis sur la tête riait.

— Il s’appelle Pépin.

Mariette, le séchoir à la main, répondit.

— Berthe aux grands pieds était mariée à Pépin le Bref non ?

Léonie qui terminait d’encaisser une cliente se joignit à la conversation.

— C’est une blague ? Quel est le nom de cette application ?

— Cupidonetmoi.com.

— Ah quand même !

Mariette et Léonie se regardèrent perplexes.

 La dame aux bigoudis reprenait :

— On doit rentrer un pseudo, et son véritable nom. La machine fait le reste.

— Je n’y crois pas du tout. Par exemple, comment pourrait-elle savoir quel homme pourrait me convenir ?

— Tu n’as qu’à essayer Léonie, proposa son amie.

Elle saisit son téléphone et chercha l’application.

— C’est vrai ça, madame Capdabelle. Berthe a bien trouvé son Pépin, vous pourriez bien trouver vous aussi.

— Je ne connais pas d’histoire particulière rattachée à mon prénom, rétorqua Léonie.

— Ce n’est pas grave ça, répliqua Mariette. De plus, regarde, tu ne tomberas pas sur un de tes clients, la machine fait en sorte que vous voyagiez.

— Montre !

Léonie fit défiler les pages.

— Pour rigoler, alors !

— Vous ne risquez pas grand-chose madame, reprit la cliente aux bigoudis, seulement trouver le grand amour.

Léonie sourit. Pourquoi pas ?

Mariette appuya sur entrée.

Dans son sous-sol bien propre, la machine ronronna puis s’emballa. Les lumières clignotèrent.

— Ah ça ne va pas recommencer, s’inquiéta Jonathan.

Il tapota à nouveau sur son clavier et murmura à voix haute :

— Cupidonne ne me joue pas encore un sale tour !

Surpris, il entendit répondre :

— Je ne joue pas. Je travaille comme tu m’as programmé. Bonjour, Jonathan, et ne m’appelle pas Cupidonne. Je suis ton application Cupidonetmoi.Com. C’est ainsi que tu m’as créée et que je me prénomme.

— Pourquoi toutes ces lumières qui clignotent ? Peux-tu m’expliquer ?

— J’ai un petit problème. Mais ne te fais pas de soucis, je saurai le régler.

— N’oublie pas que je suis ton maître et que c’est moi qui peux te réparer.

Elle ne répondit pas.

Jonathan reprit son travail. Alice était absente et c’était tant mieux. Elle lui aurait encore fait des reproches ou se serait inquiétée.

— Je te propose un nouveau couple.

— Attends la directrice. Tu sais bien que c’est elle qui gère ça.

— D’accord Jonathan, je fais comme tu me l’as demandé, je lui envoie les fiches.

Un bruit de soufflerie, l’ordinateur chauffait. Une imprimante se mit en route puis cracha deux feuilles.

À suivre…

Romance : Cupidonetmoi.com

Résumé 

Léandre Castillo est agriculteur dans une commune rurale. Ses seules passions sont ses vaches, surtout Rosalie qui a tendance à déprimer et à beugler quand elle se sent seule. Son meilleur ami, Marc Agosta ne rêve que d’une chose : lui trouver une femme.

Léonie Capdabelle est coiffeuse dans une petite ville. Sa clientèle, majoritairement féminine, l’apprécie beaucoup et n’hésite pas à faire appel à elle à n’importe quelle heure. Mariette Aglaé son associée et amie aimerait qu’elle soit plus disponible pour avoir une vie privée, qui est pratiquement inexistante.

La nouvelle application Cupidonetmoi.com est faite pour réunir les couples. Seul leur véritable nom est entré dans la machine, elle fait le reste. Son but : que chacun trouve l’âme sœur.

Mais un jour, Cupidonetmoi.com beugue.

Chapitre 1

Léandre Castillo, un bel homme de quarante ans, brun aux yeux noisette, était en retard. À l’étable, ses vaches meuglaient. La semaine commençait mal. Son réveil n’avait pas sonné. D’ordinaire, il n’en avait pas besoin, il se réveillait toujours à l’heure. Il avait pris l’habitude de programmer sa cafetière électrique et c’est l’odeur du café qui lui chatouillait les narines. Mais aujourd’hui, à cause d’une panne d’électricité, tout s’était déréglé.

De fort méchante humeur, il passa sa combinaison verte, remonta la fermeture éclair et sortit en courant.

— Eh bé fils ! tu as eu une panne d’oreiller ?

Son père, Francis Castillo le chambrait depuis la cour de la ferme. La maison de ses parents était face à la sienne. C’était une jolie bâtisse construite en U.

— Quand la Rosalie a beuglé comme une malheureuse, j’ai compris que tu n’étais pas à l’heure.

— Il y a eu une coupure de courant.

— Tu n’as pas entendu l’orage fils ?

Les deux hommes se ressemblaient. Tous deux frôlaient le mètre quatre-vingt-dix, mais si Léandre était resté mince, son père commençait à prendre de l’embonpoint. Le petit déjeuner avec le pâté maison laissait des traces pardi ! À soixante-dix ans bien sonnés, il affichait pourtant une forme olympique et ne rechignait pas aider Léandre.

L’odeur de la grange, si particulière, les saisit à la gorge dès qu’ils entrèrent. À la longue, ils n’y faisaient plus attention, mais pour ceux qui n’avaient pas l’habitude, elle pouvait surprendre et leur faire faire demi-tour illico.

L’heure de la traite était dépassée. Les deux hommes s’empressèrent de brancher les machines afin de soulager les animaux. Rosalie, quant à elle, faisait les gros yeux à son patron et sa queue fouettait l’air rageusement.

Une nouvelle journée commençait à la ferme des Castillo.

Léonie Capdabelle logeait au-dessus de son salon de coiffure. Ce matin, elle ne comprenait pas pourquoi l’alarme de son téléphone n’avait pas fonctionné. Un coup d’œil par la fenêtre lui apprit rapidement qu’elle était vraiment en retard. Deux clientes patientaient déjà devant la porte. Elles papotaient entre elles en attendant que les stores remontent.

Elle prit toutefois le temps de passer sous la douche, mais zappa le petit déjeuner. Elle perçut du bruit en bas, signe que Mariette son associée et amie était arrivée et ouvrait le salon. Les rires et les bavardages qui grimpaient jusqu’à elle la renseignèrent sur la bonne humeur qui régnait. Elle avala quand même une tasse de café.

Elle entendit la cavalcade dans l’escalier. Mariette frappait à la porte.

— Que se passe-t-il Léonie ? Tu es malade ?

Elle ouvrit et embrassa Mariette.

Autant l’une était brune, cheveux bouclés et petite, autant l’autre était blonde et montée sur des échasses. Elle frôlait le mètre quatre-vingt alors que Léonie atteignait difficilement le mètre soixante. Mariette avait d’ailleurs souvent mal au dos en fin de journée et travaillait assise.

— Mon portable n’a pas sonné. J’arrive !

Quelque part dans un sous-sol très bien agencé, un couple s’interrogeait devant l’immense ordinateur qui clignotait de partout.

— Une panne d’électricité et tout s’est déglingué, dit Alice Colargol la directrice.

— Pourtant, ce n’est pas la première fois, répondit Jonathan Playelle le développeur.

— J’espère que toutes les données seront récupérables, reprit Alice. Tu m’avais bien dit que même sans courant, la machine fonctionnerait ?

— Je ne comprends pas ce qui s’est passé.

Plantés tous deux devant l’écran géant, ils attendaient perplexes que les lumières s’éteignent et qu’un message apparaisse.

Enfin, au bout d’un laps de temps qui leur parut une éternité, la voix virtuelle emplit l’espace.

— Bonjour, je suis l’application Cupidonetmoi.com, je suis là pour vous aider. Que désirez-vous ?

Le couple se regarda.

— Elle parle comme si elle ne nous connaissait pas ?

Jonathan s’assit au clavier et rentra toutes sortes de données.

— Pourtant, tout à l’air au point.

— Fais un essai.

À nouveau, il tapota sur les touches. L’écran clignotait à qui mieux mieux et une multitude de chiffres s’afficha. Enfin, l’image se stabilisa et la voix désincarnée de l’intelligence artificielle retentit.

— Je suis prête ! Bonjour Alice ! Bonjour Jonathan ! Il fait 18 ° à l’extérieur. Que puis-je pour vous ? Je vous propose de réunir les couples

Jonathan et Alice poussèrent un soupir de soulagement. Tout était rentré dans l’ordre.

Cupidonetmoi.com était une nouvelle application qui permettait aux célibataires de la France entière de se trouver.

Alice Colargol, une femme de soixante ans aux cheveux gris, avait décidé de créer ce site de rencontres afin d’inviter les personnes à bouger et ne pas avoir la désagréable surprise de tomber sur le voisin ou la voisine de quartier ou de la ville d’à côté.

Cupidonetmoi.com avait la particularité de débusquer le couple idéal. Jusqu’à présent, elle ne s’était pas trompée et les retours de clients étaient dithyrambiques. Aucune séparation n’était à déplorer. Alice était heureuse d’avoir réussi à redonner goût à la vie à ceux qui ne croyaient plus à l’amour.

Elle s’installa à son bureau et alluma son ordinateur. De nouvelles connexions s’affichaient et elle découvrait avec un plaisir non dissimulé les demandes. Elle attendait avec impatience comment Cupidonetmoi.com allait réunir tout ce petit monde. Est-ce que des couples seront compatibles ?

À suivre …