Bonjour toi 😉
C’est le jour des enfants et les enfants c’est aussi ça ! À force de les contempler, j’ai eu l’idée de cette histoire que je partage avec toi. Figure-toi qu’en la relisant, j’ai eu la larme à l’œil.

Ils en faisaient des allers et retours, pelle et seau à la main, bob sur la tête, pour piocher de l’eau. Accroupis face à face et très concentrés sur leur tâche, ils mouillaient le sable, remplissaient leur seau, le retournaient et tapaient avec leur pelle dessus afin de démouler une merveille de pâté.
Éclats de rire, course dans le sable, cris de joie quand les vagues les éclaboussaient et quand le seau se renversait et arrivait vide devant moi.
Je prenais forme peu à peu, ils étaient fiers de leur œuvre et très heureux. Debout devant elle, ils jaugeaient leur construction : rajouter une tour ici, un chemin là, trouver des coquillages pour la décoration et ils repartaient au galop vers l’océan.
Ils y passaient des heures à creuser avec leurs mains, se cacher dans le trou, vérifier que l’eau pénétrait petit à petit et que je ne risquais rien, car ils espéraient toujours me retrouver le lendemain matin.
Ils ont tout essayé : mettre un petit drapeau en haut de mes tours pour me reconnaître, me fabriquer très loin de cette eau qui leur grignotait irrémédiablement du terrain, faire une énorme tranchée autour de moi afin que je sois protégé. Rien n’y a fait.
J’ai tenté pourtant de résister. Je savais que le lendemain, mes bâtisseurs débouleraient en courant pour voir si je les attendais, mais petit à petit, les vagues venaient me lécher les pieds et alors mes fondations fondaient, s’effritaient, et je m’écroulais désespéré.
Un jour, mes deux compères ont mis tout leur cœur, je ressentais leur rage dans leurs coups de pelles assenés sur leur seau. J’étais magnifique avec mes tours, mes créneaux et mes coquillages qui formaient un joli chemin pour arriver au pont-levis et je sentais que cette fois j’allais résister. J’avais compris que la marée était plus basse que d’habitude et par chance ils avaient choisi de me construire plus haut sur la plage.
Quand ils m’ont quitté ce soir-là avec un dernier regard, j’ai eu envie de leur faire un clin d’œil et de leur dire que je les attendrais et déjà j’étais heureux à l’idée d’entendre leurs cris de joie le lendemain. Mais les châteaux de sable ne font pas de clin d’œil et je suis resté bien droit à ma place, bien décidé à résister coûte que coûte.
Le soleil s’est couché, et j’ai pu admirer cette merveille, car j’étais toujours debout, je ne m’étais pas écroulé comme les jours précédents. Les derniers promeneurs me contournaient et murmuraient entre eux en me regardant, j’étais fier. L’eau n’était pas arrivée jusqu’à moi, il était temps, je crois, mais cette fois-ci le ciel était avec moi. Je me préparais à passer ma première nuit sur la plage et à me laisser bercer par le bruit incessant des vagues. J’étais heureux.
Le soleil s’est levé, j’ai cligné des yeux, me suis regardé. J’étais toujours debout, rien n’avait bougé. Ravi, j’ai attendu.
Ils ne sont jamais venus, les vacances étaient terminées.
© Isabelle-Marie d’Angèle
