Journal de Marie-Sophie et Archibald

Bonjour toi 😉

Marie-Sophie

Nous préparons les décorations de Noël. J’avais soumis quelques idées à Archibald pour la boulangerie. Il était d’accord ce qui ne m’étonna guère, il nous faisait entièrement confiance à moi et à Mélusine. Mon amie était à fond dans la fabrication de guirlandes, de Père-Noël, de boules, et j’en passe.

Un soir, Archibald me trouva en train de chercher de nouvelles recettes de brioche pour les fêtes. J’étais tombée par hasard sur les coquilles du nord de la France.

— Tu n’as pas envie d’essayer ?

Il se gratta la tête et me sourit.

— Crois-tu vraiment que les Basques vont accepter ce genre de brioche ? Elles ne sont pas de la région et tu les connais, ils sont très attachés à leurs traditions.

— Tu ne fais pas de gâteau basque, ils ne te le reprochent pas.

— Je suis boulanger pas pâtissier.

Il se tut et le silence s’installa ce qui n’était pas dans ses habitudes. Il est vrai que depuis quelques jours, il semblait perturbé. Or, Archibald ne l’était jamais. Il traitait les problèmes un par un, l’un après l’autre sans se poser de questions. Je l’avais toujours admiré pour ça et envié. Aussi, de le sentir ainsi, m’inquiéta.

— Tu as un souci mon cœur ?

Je savais qu’il appréciait ce petit nom. Ses yeux plongèrent dans les miens.

— J’ai revu la femme de l’autre histoire.

Je ne compris pas immédiatement ce qu’il me racontait.

— La motarde ? Angèle Merlin ?

— Non, celle avec la gamine.

Il se leva, saisit sa tasse dans le placard. Il devait être sacrément perdu pour se faire une tisane, il n’en buvait jamais. Il prit un deuxième Mug et sans me consulter m’en prépara une également. Je ne savais pas quoi dire. C’est lui qui continua :

— Elle était seule.

— Et ?

— Rien ! Je suis incapable de me souvenir de ce qui est arrivé ensuite et ça m’agace. J’ai comme la mauvaise impression qu’on m’a effacé la mémoire de cet instant.

Je faillis éclater de rire, mais devant sa mine, je me tus.

— Est-ce qu’Enzo te parle encore de la gamine ?

C’est vrai qu’il n’y faisait plus allusion.

— Non, il a dû oublier.

— Enzo ? Oublier ?

Nous nous sourîmes.

— Tu es certain que tu n’as pas rêvé ?

Je le taquinai et il prit le parti de faire comme si. Il se pencha sur mes recettes de coquille.

— D’accord, je tente le coup, je vous fais goûter et je le propose ensuite dans la boulangerie. Je vais en parler à Saverio.

Il saisit ma main, la porta à ses lèvres.

— J’ai pensé à quelque chose Marie-Sophie. Tu travailles pratiquement à temps plein avec moi quand tu fais le food truck, je vais te déclarer.

Je ne voyais pas le rapport avec ce qu’il venait de me raconter, mais je ne fis aucune réflexion. Archibald savait gérer son entreprise bien mieux que moi.

— D’autant plus que tu es ma compagne… avant de devenir ma femme.

Il me regarda, il n’avait pas lâché ma main.

— Veux-tu m’épouser Marie-Sophie ?

Les larmes me montèrent aussitôt aux yeux. Il les essuya délicatement de ses doigts si doux.

— Je ne voulais pas te faire pleurer, murmura-t-il. Tu ne penses pas que c’est une bonne idée ? Je suis idiot ? J’aurais peut-être dû faire ça autrement ?

Je lui fermai la bouche d’un baiser. Je ne m’attendais pas du tout à cette demande. Pour moi, c’était tout simple, nous étions ensemble, le reste m’importait peu, mais ce n’était pas ce que désirait Archibald. Au moment où j’allais lui répondre, on frappa à la porte. En soupirant, Archibald alla ouvrir et se trouva nez à nez avec Gabriel.

Archibald

Il y avait longtemps que cette idée tournait dans ma tête et je souhaitais faire ça dans les règles. Noël approchait et je désirais que Marie-Sophie et moi officialisions notre couple pour cette fête. J’avais réussi à l’entrainer faire les boutiques et tomber par hasard sur une bijouterie. Je ne suis pas très doué pour les cachotteries, j’avais donc profité de l’aide à Mélusine. Elle nous y avait retrouvés toujours par hasard avec Enzo. Mon filleul était un chef pour déjouer toutes les situations qui pour moi semblaient compliquées. Curieux, il s’était penché sur les bagues et avait demandé à sa marraine laquelle elle aimait. Je n’aurais pas fait mieux. Mélusine m’avait fait un clin d’œil et je connaissais ainsi les goûts de ma chérie. Ce qui est bien avec elle, c’est qu’elle n’a pas posé de questions. Je devais avouer que Mélusine en avait rajouté des tonnes en montrant différents bijoux, donnant son avis, juste pour rigoler comme elle disait. Notre complicité étant ce qu’elle était, Marie-Sophie n’y avait vu que du feu.

C’était pour ça que ce soir, je lui posais la question qui me taraudait depuis des jours, en fait, depuis que nous étions ensemble. Je voulais régulariser la situation et la protéger en même temps. Je gagnais bien ma vie, elle travaillait pour moi, normal qu’elle touche un salaire, d’autant plus que j’avais de l’argent de côté, Marie-Sophie n’était pas au courant et de toute façon, ce genre de choses lui passait au-dessus de la tête.

Je ne pensai pas qu’elle allait pleurer et j’attendais sa réponse avec appréhension, car avec elle, je devais m’attendre à tout, quand on avait frappé à la porte et que je me trouvai face à Gabriel. Lui avait vraiment le don d’arriver toujours au mauvais moment. Tout sourire, il me serra la main et comme Marie-Sophie s’approchait, il l’embrassa et la serra un peu trop fort à mon goût contre lui.

Enzo qui avait reconnu la voix de son père déboula alors dans la cuisine telle une tornade et se jeta contre lui, puis Mélusine se joignit à nous.

Faisant contre mauvaise fortune bon cœur, je proposai une tournée de tisane, café ou chocolat. Gabriel éclata de rire :

— Tu n’as pas quelque chose de plus fort ?

— À quoi boirions-nous ? demanda Mélusine.

— À ma mutation définitive. Je reste à l’hôpital, j’ai accepté le poste vacant. Chef de service aux urgences.

Enzo qui ne comprenait pas tout se pendit à son cou :

— Tu vas rester ici pour toujours ? Je vais te voir souvent ? Tous les jours ?

Gabriel serra son fils dans ses bras ;

— Oui et je vais donc devoir me trouver une maison. Pas question que je reste locataire. Si vous avez des contacts, pensez à moi.

— Félicitations !

Marie-Sophie était ravie. Elle l’embrassa sur les deux joues. Mélusine fit de même. Gabriel me regarda et dit en riant :

— Pas d’alcool, je rigolai bien sûr. Un café si tu as.

Marie-Sophie s’empressa et tout en le préparant, elle me murmura à l’oreille :

— À ta question de tout à l’heure… c’est oui !

© Isabelle-Marie d’Angèle.

À très vite…

Journal de Marie-Sophie et Archibald

Bonjour toi 😉

Te souviens – tu ? Héloïse était apparue dans cette histoire ici. La Plume s’interrogeait.

Voilà Voilà, tu retrouveras Héloïse chez Marie-Sophie, grâce à la petite sorcière Elsbeth Isobel ici. La Plume va donc faire un mix avec les trois histoires, ceci pendant le mois d’octobre, parce que c’est le mois des sorcières 😂.

Voilà donc le journal de Marie-Sophie et d’Archibald.

Marie-Sophie

— Tu y crois toi aux anges gardiens ?

Lorsqu’Enzo m’avait posé cette question, j’allais partir à la boulangerie. J’étais déjà en retard, Archibald était venu me retrouver dans ma chambre et après je m’étais rendormie. C’était Mélusine qui avait frappé à ma porte en me demandant si tout allait bien. Quand elle était entrée, elle n’avait pu cacher son sourire narquois. Je lui avais balancé mon oreiller à la tête, elle l’avait esquivé en se sauvant dans le couloir.

Mon filleul tenait un bout de baguette tartiné de confiture dans sa main. Il en était barbouillé et sa mine me fit rire. Il était craquant ce petit bonhomme et parfois je regrettais le bébé que j’avais perdu.

— Tu sais comme Mimi Mathy dans Joséphine.

Enzo adorait cette série. Mélusine et lui la regardaient en replay.

— Tu crois que Héloïse, la petite fille qui vient d’une autre histoire en est un ?

Stupéfaite, je restai muette. Je n’aimais pas le laisser sans réponse à ses questions, mais j’étais vraiment en retard. Archibald allait s’inquiéter et surtout la boutique n’allait pas s’ouvrir toute seule.

— Écoute mon chéri, je n’ai malheureusement pas le temps de…

— Je pars avec toi, comme ça je verrai Parrain.

— Et comment reviendras-tu ? Où est maman ?

Mélusine s’encadra dans la porte. Elle avait dû entendre notre conversation.

— Je passerai le reprendre en allant porter mes livraisons. J’ai aussi tout le matériel d’Halloween pour décorer la boulangerie. Archibald est d’accord.

Je n’étais pas fan de cette fête païenne, mais nous avions fait un sondage dans le village et les gamins avaient tous répondu présents.

Du coup, Mélusine avait tout confectionné elle-même. Archibald avait imaginé un pain en forme de citrouille et lui avait mis deux yeux avec des noisettes. Nous avions été les premières à le goûter, c’était délicieux comme tout ce qu’il faisait. C’était une surprise, personne à part nous étions au courant.

Je partis donc avec Enzo qui gambadait autour de moi.

— Alors tu y crois ?

Il ne lâchait rien.

— Nous avons effectivement chacun un ange gardien.

— Moi aussi ! Vrai de vrai ? Comment il s’appelle ?

Je ne le savais pas, mais Enzo trouva vite la solution.

— C’est Héloïse. Pas grave si c’est une fille ?

Je lui suggérai de lui demander si elle était d’accord. Que n’avais-je pas dit là !

— Ah oui et comment je fais, moi, pour lui parler ? Je te rappelle qu’elle n’est pas dans notre histoire.

— C’est bientôt Halloween, peut-être que si elle est un peu sorcière tu…

— Une sorcière ne peut pas être un ange gardien, marraine, c’est pas possible.

— Les gentilles sorcières peut-être !

Je lui fis un clin d’œil. Il saisit ma main et levant sa tête vers moi, il dit :

— D’accord, on va faire comme si !

Intriguée, je lui demandais :

— Pourquoi voulais-tu qu’elle soit un ange gardien ?

— Pour que Célestine aille mieux et qu’elle se rappelle de pépé Charles. Tu ne vois pas comme il est malheureux depuis qu’elle ne veut plus habiter avec lui parce qu’elle dit qu’elle ne le connait pas ?

Je savais bien que l’histoire de Célestine perturbait Enzo. Depuis son malaise, la compagne de pépé Charles ne se rappelait plus de lui. Décidément, dans cette famille, les souvenirs disparaissaient souvent. Morgan accueillait donc sa maman chez lui depuis qu’elle était sortie de l’hôpital. Elle semblait aller bien, mais seul son fils avait grâce à ses yeux.

Pépé Charles, malheureux, avait vieilli d’un coup. Il marchait voûté, avait perdu son sourire et sa joie de vivre.

Archibald

Ah la voilà, ma petite chérie, accompagnée de notre filleul. Sacré bonhomme. Ces jours-ci, il ne cessait de me parler de cette Héloïse sortie de je ne sais quelle histoire. Il s’était mis dans la tête qu’elle pourrait être un ange gardien et n’en démordait pas. J’étais certain qu’il était encore sur ça avec Marie-Sophie.

Je n’y croyais pas du tout à cette gamine venue d’on ne se sait où.

Marie-Sophie vint m’embrasser, s’excusa pour le retard et s’empressa de se changer pour ouvrir la boutique.

J’emportais les corbeilles de pain tout chaud et commençais à les installer sur les étagères. Je ne me lassais pas de ce parfum. Enzo m’aidait en babillant. J’adorais ce gosse et je ne pouvais m’empêcher de penser qu’un jour peut-être, nous aurions Marie-Sophie et moi, un enfant à nous.

Marie-Sophie nous rejoignit et je lui fis remarquer qu’elle était belle. Elle rougit alors qu’Enzo éclatait de rire.

 — C’est vrai et Marraine que t’es belle et tu sens bon.

— Stop les garçons ! Allez, on ouvre et c’est parti pour une nouvelle journée.

Je les abandonnai et rejoignis mon laboratoire et surveillai la cuisson de mes baguettes. Et c’est alors que je la vis…

© Isabelle-Marie d’Angèle

À très vite…

Journal de Marie-Sophie et Archibald

Bonjour toi 😉

Marie-Sophie

Célestine est hospitalisée. Pépé Charles avait frappé à la fenêtre de la cuisine, complètement affolé. Elle avait fait un malaise alors qu’ils prenaient leur petit-déjeuner. J’étais en train de boire mon café. Aussitôt, j’avais appelé le Samu. Charles n’avait pas pensé à prévenir Morgan, c’est moi qui ai couru chez lui. Il était torse nu quand il était sorti dans le jardin dès qu’il m’avait aperçue. Je notais ça alors que ce n’était pas du tout le moment. Parfois, le cerveau est bizarre.

Charles est monté dans l’ambulance des pompiers. J’ai suivi avec ma voiture en compagnie de Morgan. Mélusine a prévenu Archibald.

Célestine était gardée en observation. Je regardais pépé Charles qui avait vieilli d’un coup. La peur de perdre sa compagne l’avait saisi.

Morgan restait avec sa maman tandis que je ramenai Charles. Gabriel qui était de garde lui avait conseillé de rentrer. C’était inutile d’attendre, il devait prendre soin de lui. Ils n’étaient plus tout jeunes et à leur âge, il valait mieux éviter les émotions fortes.

Sur le retour, il posa sa main sur ma jambe :

— Tu dois profiter de ton nouveau bonheur Marie-Sophie, d’un coup, il peut t’être enlevé.

Je ne comprenais pas ce qu’il voulait dire.

— Ne fais pas l’idiote, tu crois que je n’ai pas vu que tu es en couple avec Archibald ? Je me lève tôt tu sais, et ta chambre donne sur le jardin. Tu n’accroches pas tes volets, il te rejoint avant de partir. Es-tu heureuse ?

— Oui, répondis-je d’une petite voix.

— Alors tout va bien et profites-en avant qu’il ne se sauve, le bonheur c’est fragile, il faut en prendre soin.

Il se tut et ferma les yeux. J’ai cru qu’il s’était endormi, mais il dit :

— Il y a quelques jours qu’elle ne sentait pas bien, elle se disait fatiguée. Je n’aurais pas dû l’écouter et appeler Gabriel. Elle n’avait pas voulu. Elle est têtue comme une bourrique !

Mélusine m’attendait sur le pas de la porte. Enzo était avec elle. Je lui racontai ce que je savais. Pépé Charles est rentré chez lui, il paraissait exténué. J’ai tenté de l’accompagner, il a refusé.

— Petite, je dois m’habituer à rester seul. J’en aurai profité quelque temps.

— Mais qu’est-ce que tu me chantes là, Célestine va revenir, Gabriel ne semblait pas inquiet.

Il haussa les épaules et me renvoya chez moi.

J’interrogeai Mélusine.

— Si j’appelais Gabriel, il en sait peut-être davantage ?

Je n’eus pas besoin de le faire, mon portable vibra. C’était Morgan. Célestine, très confuse ne le reconnaissait pas. Elle allait devoir subir toute une batterie d’examens.

— Comment vais-je annoncer ça à Charles ?

Mélusine entoura mes épaules, Enzo se blottit contre moi et lâcha :

— Ne sois pas triste, marraine. Je suis sûr que ce n’est pas grave. Je n’aime pas quand tu n’as pas le sourire. C’est pour ça que parrain vient dans ta chambre le matin, pour te faire rire ?

Tu parles d’un secret bien gardé ! Mélusine pouffa.

— Ben quoi qu’est-ce que j’ai dit ? demanda Enzo.

© Isabelle-Marie d’Angèle

À très vite…

Journal de Marie-Sophie et Archibald

Bonjour toi 😉

Marie-Sophie

L’été était passé à une allure grand V. Les deux mois avaient filé sans que je m’en rende compte. Les touristes avaient afflué et la boulangerie n’avait pas désempli. Archibald avait finalement recruté une jeune femme à mi-temps pour les jours où je partais avec le food truck. Elle s’appelait Maddi Artola et était une amie de François. Il nous l’avait chaudement recommandée et nous n’avons pas été déçus.

Je me regardai dans le miroir de la salle de bains. J’affichai un sourire béat qui ne me quittait pas. C’était arrivé comme ça, un soir…

Archibald et moi étions rentrés à pied comme d’habitude. Je lui racontais ma journée, il faisait de même. Soudain, j’entendis une cavalcade derrière moi. Instinctivement, je saisis la main d’Archibald, un troupeau de moutons dévalaient le sentier. La bergère et son chien suivaient. Elle nous salua en s’excusant de nous avoir fait peur, mais les clôtures du pré ayant été endommagées, elle ne pouvait y laisser ses animaux. C’était un voisin qui l’avait prévenue parce qu’une brebis, plus curieuse que les autres, s’était aventurée sur la route.

Le troupeau était passé, mais Archibald n’a pas lâché ma main et je n’avais rien fait pour lui reprendre. Je savais que nous pouvions emprunter un sentier pour gagner du temps. Nous ne le faisions jamais, parce que nous préférions rester sur le chemin habituel, mais ce soir-là, il s’y engouffra m’entrainant avec lui. Comme deux gamins, nous éclatâmes de rire en courant sur ce sentier dérangeant les petits animaux. Puis, il s’arrêta. Il saisit mon visage entre ses mains, plongea ses yeux dans les miens, cherchant peut-être une réponse à sa question. J’avais le cœur qui battait la chamade et je sentais le sien s’affoler également contre le mien. Il approcha sa bouche de la mienne. Je le connaissais par cœur, mais je n’avais jamais été aussi près de ses lèvres.

J’eus peur de ne pas aimer. Pas facile de passer du stade de meilleur ami à… amant.

Oui, ce soir-là, tout bascula et depuis, j’avais les étoiles plein les yeux. Pourtant, il m’avait fait jurer de ne rien raconter à personne, même pas à Mélusine. Il voulait que ça reste notre secret, pendant un certain temps. Je lui promis et je me rappelai encore son rire.

Il m’enleva les brindilles accrochées à mes cheveux, je me souviens de ses mains si caressantes. Jamais je n’aurai imaginé qu’il pouvait les avoir si douces. C’est alors que je regrettai tout ce temps perdu.

Quand nous sommes rentrés à la maison, il n’y avait personne. Mélusine était chez François. Notre secret ne fut pas éventé.

Et depuis, les jours passaient et nous agissions comme si de rien n’était. Archibald n’hésitait pas à venir me rejoindre dans ma chambre, je n’avais pas encore osé le retrouver. C’était facile pour lui, il se levait tôt, il suffisait qu’il décale son réveil et il s’arrêtait à ma porte.

— Je peux entrer ?

Je fis signe à Mélusine qui se planta devant moi.

— Dis-moi, c’est parce qu’il fait les viennoiseries qu’Archibald se lève aux aurores ? Je ne dormais pas, il faisait trop chaud. Il est descendu de bonne heure.

Je baissai la tête pour qu’elle ne voie pas mon sourire et fis celle qui n’avait rien entendu.

— Figure-toi qu’Enzo voulait lui demander quelque chose hier matin, et il n’était pas dans sa chambre.

— Enzo se lève si tôt ?

Je finissais de me coiffer et passais devant elle pour aller préparer le petit déjeuner.

Archibald arrivait et il déposa les viennoiseries toutes chaudes sur la table.

Archibald

Depuis que MarieSophe était devenue ma femme, même si nous ne sommes pas mariés, je la trouvais encore plus belle.

Ce matin-là, Mélusine me cueillit par surprise dans la cuisine.

— Salut toi ! tu te lèves bien tôt ! Je t’ai entendu.

— Il fait chaud, je ne dors pas bien ici, à la boulangerie il fait plus frais.

— Mais bien sûr, ricana-t-elle, avec tes fours allumés, tu m’en diras tant. Avoue plutôt que tu t’es trouvé une petite copine et que tu vas la retrouver.

Elle rit et se tourna vers Marie-Sophie. La chipie avait les yeux qui pétillaient.

— Tu ne sais rien toi ? lui demanda-t-elle.

Marie-Sophie haussa les épaules. Mélusine insista :

— On la connait ?

— Tu affabules, tu crois sincèrement que j’ai le temps pour ça ?

— C’est vrai que tu ne vois personne, à part nous, mais tu dois bien avoir envie parfois de…

— Je n’ai pas l’intention de venir dans vos lits les filles, je me débrouille.

J’éclatai de rire et enchainai :

— Voilà le petit déjeuner, donnez-moi votre avis.

Je quittai aussitôt la cuisine, regrettant de ne pas embrasser Marie-Sophie, mais c’est Pépé Charles qui me topa dès que je franchis le portail du jardin.

— Salut mon garçon !

Lui c’est l’inverse qu’il avait remarqué.

— Dis-moi, tu pars plus tard non, le matin ? Si tu dors davantage, tant mieux.

Pourquoi ai-je eu l’impression qu’il se moquait de moi ? Il me tapa sur l’épaule, me fit un clin d’œil et s’en alla en sifflotant.

Pas facile de cacher ma joie et mon bonheur. J’étais certain que tout le monde savait… je souhaitai vraiment garder notre secret. C’était tout neuf et je savourai ces moments volés.

Alors que j’arrivai à la boulangerie pas encore ouverte, j’aperçus Gabriel. Il me fit signe et me rejoignit.

— C’est toi que je voulais voir, dit-il en me serrant la main.

Je l’invitai à entrer dans mon laboratoire.

— Je me demande comment tu fais pour supporter cette chaleur.

— Question d’habitude.

Je revêtis ma tenue blanche attendant qu’il me parle.

— J’ai besoin de ton avis. Il y a un moment que Morgan est rentré et Marie-Sophie semble heureuse. Crois-tu qu’elle soit passée à autre chose et que je pourrai à nouveau tenter ma chance ?

Je pris le temps de répondre sentant une vague de jalousie m’envahir. Je ne connaissais pas ce sentiment et aussitôt je le détestai. La jalousie ? Pas pour moi, je me l’étais promis. J’en avais trop souffert gamin ! je l’interrogeai tout en sortant mes baguettes du four.

— Je pensai que tu avais lâché l’affaire ?

— Hum ! on voit bien que tu n’es pas amoureux toi ! si tu crois que c’est facile !

— Désolé, je ne me doutais pas que tu étais aussi mordu.

Je devais vraiment prendre sur moi pour lui répondre calmement.

— Alors ? Toi qui la connais bien, tu es son meilleur ami, tu dois bien savoir si elle a rencontré quelqu’un ?

J’hallucinai ! Je n’aurai jamais imaginé que Gabriel viendrait me parler de Marie-Sophie de cette façon. Nous n’étions plus des gamins et à l’écouter, j’avais l’impression de me trouver face à un ado.

Il dut s’en rendre compte à mon soupir et haussement de sourcils.

— D’accord, je suis complètement idiot.

— Tente ta chance, tu verras bien.

— Sérieux ? Tu penses que j’ai une chance ?

Je regrettai aussitôt ma réplique à découvrir son sourire béat et surtout d’avoir fait promettre à Marie-Sophie de garder le secret sur nous deux.

© Isabelle-Marie d’Angèle

À très vite…

Cafouillis et Embrouillamini, ça continue

Bonjour toi 😉

Quand les personnages s’en prennent à La Plume…

— Comment ça la Commandante a disparu ?

Le procureur criait dans le téléphone et Kawas l’écoutait sans réagir. Angèle s’était bel et bien évaporée.

Le capitaine n’avait rien compris. Angèle était là avec lui et puis elle n’y était plus. Elle avait dû quitter le bureau pour aller chercher quelque chose ou répondre à un appel perso, il n’en savait rien.

Il avait pensé qu’elle reviendrait rapidement et pris par d’autres affaires, il n’avait pas fait attention. C’est quand un de ses collègues était venu pour une signature qu’il s’était rendu compte qu’elle n’avait pas reparu.

Aussitôt, il s’était rendu à la banque de François Destrée. Celui-ci l’avait reçu cordialement, mais il n’avait pas vu Angèle.

Kawas s’était agacé et lui avait demandé si son père n’était pas l’instigateur de cette disparition. Destrée l’avait immédiatement appelé gagné par la colère du capitaine. Mais, Destrio avait affirmé qu’il n’avait pas vu la Commandante, de plus, il était à des centaines de kilomètres de là.

Le policier était allé chez elle. Le chat Pistole miaulait derrière la porte-fenêtre. Sachant où trouver la clé, il s’était occupé de lui en lui donnant ses croquettes et de l’eau. Celui-ci s’était frotté contre ses jambes en ronronnant. Très inquiet, Théo s’interrogeait. Jamais sa supérieure ne serait partie abandonnant son animal.

De retour au commissariat, il convoqua toute la brigade et les avertit qu’Angèle avait disparu.

— Je ne peux pas rester ici indéfiniment, se lamentait Angèle. J’ai du travail, une enquête à résoudre. Mon équipe doit être aux quatre cents coups, je ne peux pas m’absenter ainsi sans raison. Ils vont tous penser qu’il m’est arrivé quelque chose de grave. Il n’y a pas moyen de faire quelque chose ?

Angèle marchait de long en large dans l’atelier d’Archibald. Celui-ci s’agaçait. Il prenait du retard sur ses fournées. De plus, c’était le jour où la clientèle était la plus importante avec le marché qui avait lieu sur la place.

La camionnette de Saverio s’arrêta devant la porte. Le basque salua haut et fort Archibald ce qui eut le don de faire sursauter Angèle.

Elle n’hésita pas une seconde. Si la Plume ne faisait rien pour la renvoyer dans son histoire c’est elle qui allait prendre le taureau par les cornes.

— Bonjour ! Angèle Merlin, commandante à la brigade de…

Elle marqua un temps d’arrêt, où était situé son commissariat ? Du plus loin qu’elle se souvenait, la ville n’avait pas été mentionnée. Vaguement, elle se rappelait que sa rencontre avec Paco s’était passée dans un coin de France, avec ça, elle était bien avancée.

Stop ! Ne la ramène pas trop Angèle Merlin, la Plume n’a pas mentionné le nom de la ville, elle a ses raisons. Non, mais je rêve, elle ne va pas la commander aussi. La Plume t’a créée Commandante de la police, pas de l’écriture.

— Ce serait quand même plus pratique pour retourner chez moi, commente Angèle.

Incroyable, le personnage prenait le dessus sur la Plume. Elle allait voir de quel bois elle se chauffait.

— Et si je décidai de te laisser là ? réagit la Plume.

— Mais tu parles ?

— Non, j’écris.

— C’est pareil. Pourquoi ne pourrais-je pas rentrer chez moi ? Tu as pensé à mon chat ?

— Et Paco ?

— Lui, il peut se débrouiller tout seul, pas Pistole.

— Il y a un truc que tu ne comprends pas, c’est moi qui décide de ce qui peut arriver à ton chat. D’ailleurs, je crois que je ne l’ai pas laissé mourir de faim, ton collègue est allé lui donner ses croquettes.

— Merci, mais je ne comprends pas pourquoi je reste coincée ici.

— J’ai perdu ton cahier. Ne fais pas cette tête, je vais le retrouver.

— Et comment as-tu fait pour écrire que mon collègue est allé sustenter mon chat ?

— J’ai écrit sur une feuille. Oh et ça suffit !

La Plume éteignit l’écran.

© Isabelle-Marie d’Angèle (juillet 2023)

À très vite…

Cafouillis et Embrouillamini encore

Bonjour toi 😉

Et ça continue encore et encore, c’est le bazar 😁

Archibald entendit arriver une motarde qu’il n’avait jamais vue. Elle abandonna son engin devant son atelier de boulangerie.

– Tiens, une touriste de passage qui a dû se perdre, pensa-t-il.

Il était rare que les villageois débarquent de ce côté, l’arrière de son magasin donnant sur une impasse. Il sortit sur le pas de la porte s’essuyant ses mains enfarinées à son tablier.

– Bonjour, vous cherchez quelqu’un ? Cette rue s’arrête ici.

La voix grave de son interlocutrice le surprit. Masculine avec ses bottes de moto et féminine avec ses cheveux croulant sur ses épaules, elle symbolisait un savant mélange de séduction.

– Commandante Angèle Merlin, se présenta-t-elle.

Il sourit.

– Vous êtes flic ? Jamais je ne l’aurais imaginé.

– Pourquoi ? Vous croyez encore au vieux commissaire moustachu ou à l’inspecteur à l’imperméable ? Vous parlez comme Paco.

– Qui est Paco ?

– Mon ami d’enfance.

Archibald pensa aussitôt à Marie-Sophie. Les deux femmes n’avaient rien en commun physiquement et pourtant cette amitié d’enfance les rapprochait.

– C’est marrant, vous ressemblez à Paco.

Le casque à la main, elle tournait la tête de droite à gauche, semblant chercher quelqu’un. Quelque chose clochait.

Une rouquine arriva derrière Archibald et l’interpella :

– Il te reste des…

Elle s’interrompit en découvrant Angèle. Elle s’approcha de son ami et détailla la nouvelle venue.

– Vous n’êtes pas d’ici. En vacances ?

Angèle hésita à répondre, c’est Archibald qui le fit à sa place.

– Madame est commandante de police.

Curieuse, Marie-Sophie l’interrogea :

– Il ne se passe pas grand-chose dans le coin. Vous êtes là pour une enquête ?

Angèle abandonna sa moto et vint vers eux.

– Je ne sais pas trop où je suis.

Archi et Marie-Sophie se regardèrent interloquées. Cette inconnue semblait pourtant être équilibrée, mais peut-être souffrait-elle d’un mal inconnu ?

– Au Pays basque, un petit village fort sympa.

Angèle ouvrit de grands yeux.

– Mais qu’est-ce que je fais ici ?

Les deux amis eurent pitié de la jeune femme. Marie-Sophie lui saisit la main et l’entraina à l’intérieur. Sans se concerter, Archibald décida d’aller au comptoir de la boulangerie et proposa à Marie-Sophie d’emmener Angèle chez eux, mais Angèle refusa, son esprit de fliccarburant à toute allure.

– Non, je ne veux pas vous déranger. Je vais me débrouiller.

Elle chercha aussitôt son portable pour appeler son capitaine.

Marie-Sophie murmura :

– Vous allez peut-être me prendre pour une folle, mais ne viendriez-vous pas d’une autre histoire ?

Angèle remonta ses cheveux et les attacha avec son élastique.

– Vous ne connaissez pas Paco ?

Marie-Sophie fit non de la tête.

– Je peux vous dire un secret ? Si voue ne faites pas partie de la même histoire, vous pourrez peut-être m’aider.

Elles s’assirent sur le banc appuyé contre le mur de la boulangerie à l’ombre.

– Paco est un voyou. C’est mon meilleur ami et moi je suis flic.

– Voyou comment ?

– Un gentil, comme un Robin des bois moderne. Vous allez rire, sa couverture ? Il est directeur de banque.

Angèle se tut. Marie-Sophie continua à sa place :

– Et vous ne voulez pas l’arrêter.

Angèle haussa les épaules et ajouta :

– S’il n’y avait que ça !

Marie-Sophie crut comprendre.

– Vous êtes amoureuse de lui ?

Angèle ne répondit pas. Marie-Sophie murmura :

 – C’est pareil pour moi.

– Vous êtes flic ?

Elles rirent déjà complices. C’est ainsi que les trouva Archibald. Angèle le regarda. Il ne voyait que Marie-Sophie. Elle comprit.

– Comment faire pour retrouver mon histoire ?

Archibald haussa les épaules.

– C’est la plume qui décide. Quelle peur j’ai eue quand j’ai perdu Marie-Sophie, ça n’a pas duré longtemps fort heureusement. Elle avait disparu et d’un coup, elle était là.

– La plume ?

Angèle ne comprenait rien.

– Oui, c’est elle qui vous renverra dans votre cahier. Pour ma part, je n’ai même pas eu l’occasion de dire au revoir quand ça m’est arrivé, soupira Marie-Sophie, subitement, je me suis retrouvée ici derrière mon comptoir et puis… vous avez débarqué.

© Isabelle-Marie d’Angèle (juillet 2023)

Gros problème 😁

Où est mon cahier de J’aime un voyou au grand cœur ? 🙄🤔

Que va-t-il se passer si je ne le retrouve pas ? Que va devenir Angèle ?

La suite bientôt …😀

À très vite…

Journal de Marie-Sophie et Archibald

Bonjour toi 😉

Finalement, j’aime bien le concept d’avoir le point de vue de mes deux personnages au même moment. Je te laisse retrouver Marie-Sophie 😊.

Marie-Sophie

Avec les idées que j’ai en tête, difficile de rester naturelle avec Archibald. Heureusement, les journées sont bien remplies et je n’ai plus seize ans. Encore qu’à cet âge-là, je connaissais déjà Archibald. Maman me serinait que ce garçon l’agaçait. Elle ne voyait pas d’un bon œil ce type qui passait beaucoup de temps à la maison. Mélusine faisait aussi partie de ma vie, mais ma mère trouvait qu’elle était quelqu’un de bien. Archibald, lui, était le bad boy. Celui qui en vieillissant, alors qu’il passait ses examens de boulangerie, venait me faire tester toutes ces créations. Quand il avait ouvert son magasin, maman avait été obligée de remarquer qu’il n’était peut-être pas si infréquentable. Mais elle rabâchait qu’à cause de lui je ne trouverais jamais l’homme de ma vie. Était-ce lui, justement, l’homme de ma vie ?

Mélusine n’a pas dormi à la maison et lorsqu’elle débarque dans la cuisine, je ne peux m’empêcher de rire en la voyant arriver, les cheveux ébouriffés et les yeux cernés, mais elle m’attaque d’entrée :

— Ne t’imagine rien, Enzo a été malade toute la nuit.

Stupéfaite, je demande :

— Où étais-tu alors ? Tu n’as pas couché ici ?

Agacée, elle répond :

— Bien sûr que si, mais tu dormais quand je suis rentrée. J’ai appelé Gabriel et il est venu l’ausculter. Apparemment, c’est une gastro, il a encore dû manger n’importe quoi, gourmand comme il est. Bref, il a dormi avec moi, seulement, Enzo est très remuant la nuit, je n’ai pas beaucoup dormi et de plus, j’étais inquiète.

Je n’ai rien entendu. C’est vrai que j’ai un sommeil de plomb.

— Archibald n’était pas là ?

— Je n’en sais rien, je ne suis pas allée frapper à sa porte. Il était déjà tard et comme je sais qu’il se lève tôt, je n’allais pas le déranger. Tu me sers un café, j’en ai bien besoin. Du coup, je ne pourrai pas t’accompagner dans le food truck, je vais rester avec lui et travailler mes coutures ici. Tu pourras te débrouiller toute seule ?

— Bien sûr, les clients attendront un peu plus avant d’être servis, ils en profiteront pour parler entre eux.

Je n’en reviens pas, c’est Morgan. Mélusine qui l’a reconnu également, murmure :

— Je te laisse MarieSophe.

Il frappa à la porte et attendit que je lui ouvre. Il était là devant moi, je reconnus immédiatement le Morgan d’avant, celui qui m’avait accueilli pour la première fois dans sa chambre d’hôte. Apparemment, l’éloignement lui avait fait du bien. Il souriait et à nouveau, je retrouvai la manière qu’il avait de plisser les yeux quand il me regardait. Mon cœur s’accéléra. Il me tendit la main et m’attira vers lui. Contre lui, je respirai son parfum qui m’avait manqué, je devais l’avouer. C’est ainsi qu’Archibald nous trouva quand il arriva avec le pain frais et autre chose dans la main.

Archibald

Je ne voulais pas me lancer dans la fabrication des viennoiseries alors que je savais parfaitement les fabriquer. Après maintes et maintes fois refusé, j’avais tenté un essai et je voulus en faire la surprise à MarieSophe.

Bien mal m’en a pris, je la trouvai dans les bras de Morgan. Immédiatement, je m’imposai un sourire et ne laissai rien voir de ma déception.

— Morgan ? Quelle bonne surprise ?

Je les vois se détacher et aussitôt je captai le regard de Marie-Sophie. Je la connais suffisamment pour comprendre qu’elle est ravie de le retrouver, mais autre chose aussi est inscrit dans son regard.

Morgan me tendit la main. Quelque chose était changé chez lui et je ne parvenais pas à définir ce que c’était. Dans tous les cas, il semble apaisé et en pleine forme.

— Racontez-moi ! Je ne vous cache pas que Charles m’a mis au courant de tout ce que vous avez entrepris avec le food truck. Cybèle a eu une excellente idée de vous céder son affaire. Vous avez de ses nouvelles ?

Je racontai. Marie-Sophie en profita pour préparer du café. Elle sortit la tasse préférée de Morgan. Depuis le temps qu’il était parti, elle était pourtant restée à la même place.

— Je vais reprendre toutes mes activités et surtout si vous avez besoin de moi, n’hésitez pas. J’ai cru comprendre que mon miel plaisait beaucoup. Je vais retrouver mes ruches et mes chèvres. Vous allez rire, mais mes animaux m’ont fait la fête ce matin.

Je regardai son chien couché à ses pieds.

— Merci à vous tous, j’ai retrouvé ma maison comme si je ne l’avais jamais quitté. C’était une parenthèse que j’ai été obligé de faire.

Il contempla Marie-Sophie qui baissa les yeux.

— Je vous raconterai… ou pas.

Il a avalé son café et posé sa tasse, il nous attrapa tous les deux dans ses bras et nous murmura que nous lui avions manqué et que tout allait bien maintenant.

— Assez de mélancolie, ce n’est pas mon genre, affirma-t-il. Je vais faire un tour au village, saluer tout le monde. Tu viens, le chien ?

L’animal était déjà debout. Morgan nous salua d’un sourire puis s’en alla les mains dans les poches en sifflotant.

— Je suis seule pour le food truck ce matin, dit Marie-Sophie, comme si de rien n’était. Enzo a été malade cette nuit, Mélusine préfère le garder.

Je n’hésitai pas une seconde. Je rattrapai Morgan.

— Ça te dirait de tenir la boulangerie ce matin ? Tu verras tout le monde d’un coup.

Je lui expliquai pourquoi j’avais besoin de lui. Il eut un vrai sourire et me tapa sur l’épaule.

— Très bonne idée, comme ça vous serez tous les deux, ajouta-t-il d’un ton sibyllin.

© Isabelle-Marie d’Angèle

À très vite…

Journal de Marie-Sophie et Archibald

Bonjour toi 😉

Pourquoi ce titre ? Tu comprendras au cours de ta lecture 😉 et surtout n’hésite pas à dire ce que tu en penses 😊.

Marie-Sophie

Il n’était pas bien loin Charles ! Il expliqua à Célestine qu’il retrouvait Morgan régulièrement, histoire de le mettre au courant de ce qui se passait au village.

Pauvre Charles ! Il s’était pris un savon par la mère de Morgan qui n’avait pas compris pourquoi son fils ne lui avait pas fait confiance à elle. Il avait rétorqué qu’elle était trop bavarde et qu’elle n’aurait pas tenu sa langue cinq minutes et m’aurait immédiatement tout raconté. Célestine a été très vexée et a fait la tête à Charles, à tel point qu’il venait souvent déjeuner à la maison. Il repartait tard le soir, quand la lumière de notre voisine était éteinte. Je n’ai pas osé lui poser la question, s’il dormait quand même avec elle ou s’il utilisait le canapé du salon. À son âge, ça n’aurait pas été raisonnable.

Il tenait aussi souvent la boulangerie et bavardait avec les habitants et Archibald. C’est ainsi qu’un jour, je l’ai vu débarquer dans ma cuisine, très énervé.

— Vous n’avez pas assez perdu de temps toi et Archibald ?

Il s’était laissé tomber sur une chaise et m’avait réclamé quelque chose à boire. Il faisait chaud et il transpirait. Je lui versai un verre d’eau qu’il avala d’un trait, puis il posa son regard sur moi, il me détailla des pieds à la tête, ce qui me mit mal à l’aise.

— Quel âge as-tu maintenant gamine ?

Quand il m’appelait ainsi pépé Charles, c’est qu’il allait m’assener quatre vérités bien senties. Je la connaissais bien cette phrase, elle n’annonçait en général rien de bon.

J’étais seule. C’était le tour de Mélusine de tenir la boulangerie et pour une fois, le food truck ne bougeait pas. J’avais ma journée de repos, mais elle commençait mal. Je claculai mon âge, c’est vrai que les années passaient et que je me rapprochais des trente-cinq ans.

— Et Archibald ?

Ah ! nous y voilà ! encore le même refrain, mais ce qui suivit me scotcha.

— Morgan va rentrer. Il n’était pas très loin d’ailleurs. Il m’a dit qu’il pensait t’avoir laissé assez de temps pour réfléchir à ta situation. Je viens de sermonner Archibald, c’est ton tour. Quand est-ce que vous allez enfin réaliser que vous êtes faits l’un pour l’autre ? Même Morgan en est persuadé. Tu ne t’es jamais demandé pourquoi il n’avait pas insisté pour que tu t’installes chez lui ? Au fond de lui, il avait compris tu ne l’aimais pas assez pour vivre avec lui. Il m’a avoué que s’il avait su que tu étais enceinte, il se serait interrogé, étais tu étais prête à abandonner Archibald ? C’est pour cette raison que lorsqu’il a retrouvé la mémoire, il est parti. Il avait trop honte d’avoir pensé que finalement c’était mieux comme ça, tu n’avais pas à choisir. Aujourd’hui, il rentre. Il espère bien que vous resterez amis même si ses sentiments sont plus forts que les tiens.

Lorsque Charles se tut et qu’il me dévisagea, je ne sus quoi répondre. Est-ce que Morgan avait raison ? Est-ce pour ça que je n’avais pas réussi à lui annoncer la nouvelle de ma grossesse ? S’il n’avait pas eu son accident, qu’est-ce qui serait arrivé ? Je me replongeais dans le passé quand Gabriel s’était installé devant chez moi, j’imaginais avoir des sentiments pour lui, mais Archibald était dans mon coeur. C’est pour cette raison que j’avais fui et atterri ici. Seule avec Morgan, je croyais en être tombée amoureuse, mais dès que j’avais retrouvé Archibald, même Gabriel n’avait plus compté. Je pensais à Morgan, mais c’était toujours Archibald qui était dans ma tête.

Seulement, Archibald ne voulait voir en moi que sa meilleure amie.

Au stade où j’en suis de mon écriture, je suis à un carrefour. Aussi, voici le journal d’Archibald à partir de ce moment, son regard d’homme m’aidera peut-être à y voir plus clair. Ma plume ne parvient pas à se décider entre Morgan ou Archibald. Il y a un truc qui cloche quelque part, je ne vois pas lequel. Que pense donc Archibald ?

Archibald

Quelle mouche avait piqué Charles ? Je l’aime bien ce vieil homme. Il fait partie de notre vie à MarieSophe et Mélusine depuis longtemps. MarieSophe en a toujours parlé, je sais qu’elle le considère comme le grand-père qu’elle n’a jamais eu. Il a eu quand même un sacré courage de déménager pour la suivre jusqu’ici, parce que je ne me fais aucune illusion, c’est pour elle qu’il est là, même si Célestine y est pour quelque chose, sans MarieSophe, il aurait été perdu. Il m’a tellement raconté comment le fait de voir quotidiennement la maison fermée puis vendue le rendait malade et triste. Aussi, je n’ai pas compris pourquoi aujourd’hui, il est venu me passer un savon sorti de je ne sais où.

Heureusement que mes mains pétrissent la pâte, ça m’occupe l’esprit. J’entends Mélusine qui bavarde avec un client. Ce n’est pas MarieSophe, mais avec elle, nous formons un chouette trio et notre amitié est tellement solide que…

Je soupirai. J’ai peur ! mes sentiments pour ma meilleure amie, enfin, ai-je encore le droit de l’appeler ainsi, ont évolué et pépé Charles l’a compris. J’ai de plus en plus de mal à faire semblant, mais je m’en veux beaucoup d’avoir été soulagé qu’elle n’ait pas gardé ce bébé. Je sais, je suis un monstre. J’aime bien Morgan, il ne méritait pas ça, je m’étais presque fait à l’idée qu’ils allaient faire un couple, mais quand il a perdu la mémoire et que j’ai vu comment MarieSophe était malheureuse, mes sentiments sont revenus en force et je n’en suis pas fier. J’ai bien essayé de me rapprocher de Cybèle, mais elle a vite compris qu’elle et moi, ça ne marcherait jamais. En plus, elle n’était pas libre. Je me souviens du jour où en riant, elle m’a demandé pourquoi je me mentais à moi-même.

Faut-il être con pour ne pas oser franchir le pas ? MarieSophe est libre, elle ! dès que je la regarde, j’ai le cœur qui s’affole alors que je la connais depuis longtemps. Je la trouve belle, amusante, elle me fait rire et sortir de mes gonds aussi. Elle n’a pas conscience de ce qu’elle renvoie quand elle est face à moi, mon cœur fond de tendresse pour elle. Je l’admire, elle a su parfaitement s’adapter au food truck, elle plait aux clients. Quand, elle ne m’accompagne pas, qu’elle reste à la boulangerie, il ne se passe pas un instant sans qu’on me parle d’elle. Ce qu’elle ne sait pas c’est que souvent, on l’appelle ma femme lorsqu’ on me demande votre femme n’est pas avec vous aujourd’hui ? Elle n’est pas malade au moins ? Et moi, pauvre idiot, vous croyez que je rectifie en disant qu’elle n’est que mon amie ? Non, parce que pendant quelques minutes, elle est mon épouse.

Donc ce matin, Charles est venu me demander quand j’allais enfin me conduire comme un homme ? Le ton est monté, même Mélusine était inquiète, il parait qu’on nous entendait depuis la boutique. Charles m’a laissé en plan et je suis certain qu’il est parti chez MarieSophe, remonté comme une horloge, il n’allait pas s’arrêter en si bon chemin.

Je regarde ma pâte, elle est magnifique. À force d’être pétri, le pain va être encore meilleur, pour une fois que je n’utilise pas la machine, je verrai si je peux le proposer à la vente. Je le ferai goûter à MarieSophe, elle me dira ce qu’elle en pense. Je souris. Décidément, que ferais-je sans elle ?

© Isabelle-Marie d’Angèle (juin 2023)

À très vite…

Journal de Marie-Sophie

Bonjour toi 😉

Nous étions toutes les deux, Mélusine et moi. Elle m’avait accompagnée dans le food truck, ce qui lui permettait de montrer ce qu’elle confectionnait, avec tous ces bouts de tissus multicolores elle avait du succès. Elle avait des mains de fée mon amie, elle portait bien son prénom, une vraie sorcière.

Entre la vente du pain et ses bavardages, nous n’avons pas vu passer la matinée. Elle avait distribué ses adresses sur les réseaux sociaux et non, elle n’avait pas de boutique physique, juste virtuelle. Il avait fallu qu’elle explique tout ça aux mamies qui ne comprenaient pas toujours, mais dans l’ensemble avec le sourire, elle réussissait à convaincre.

Ravie mon amie, je la regardais noter sur son cahier toutes les commandes qu’elle avait pu faire. Je crois que son plus gros succès était les Tote bags en coton qu’elle fabriquait. Chacune y allait de sa personnalisation, j’étais heureuse pour elle.

Je profitai du calme revenu, midi n’étant pas loin et nous allions remballer, pour faire ma curieuse.

— Comment ça va avec François ?

Elle rit.

 — Je me demandais quand tu allais m’en parler, plutôt bien. Je crois que finalement, je vais en tomber amoureuse, mais je te rassure tout de suite, pas question de vivre ensemble. Je tiens trop à mon indépendance et à notre vie en communauté avec Archibald.

Nous n’avions pas vu un petit groupe de personnes qui s’approchaient avec table de pique-nique et fauteuils. L’un d’eux me demanda :

— Est-ce que ça pose problème si on s’installe ici pour manger vos spécialités ?

Je le reconnaissais. Il avait acheté des sandwichs au fromage de chèvre et au miel.

— Ce serait sympa de déjeuner entre nous, il n’y a pas de bar, ça nous manque un peu de nous retrouver entre amis. Vous n’y voyez pas d’inconvénients ?

Mélusine et moi, nous nous sommes regardées. L’idée ne nous était pas venue, mais pourquoi pas après tout ? Par contre, si nous devions rester plus longtemps que prévu, il faudrait prévenir Archibald que je ne pourrais pas être à l’heure à la boulangerie.

Je contemplai ces personnes d’un certain âge qui s’installaient tranquillement sur la place, devant notre food truck. Nous n’avions que de l’eau à leur offrir, mais ils s’étaient organisés et avaient apporté un petit barricot de vin.

— Vous avez d’autres sandwichs ?

Mélusine s’en occupa, avec le fromage de chèvre et le miel de Morgan, nous pouvions encore un peu assurer, mais bientôt, nous n’aurions plus rien. Je réfléchissais à ce que nous pourrions imaginer pour les prochaines fois.

J’appelai Archibald pour le tenir au courant. Il n’était jamais à court d’idée, il me dit qu’il allait voir avec Saverio. Il avait toujours du jambon basque et du fromage en réserve, pourquoi ne pas lui en acheter ou même utiliser les recettes qu’il proposait à ses clients. Si nous étions en retard, Archibald serait derrière le comptoir et si ça devait se reproduire souvent, il penserait à embaucher quelqu’un à mi-temps.

Le groupe bavardait à qui mieux, riait, et Mélusine et moi voyions bien qu’ils étaient heureux de prendre l’air sur la place tous ensemble.

J’en profitai pour relancer la conversation sur François.

— Il est d’accord François pour vivre séparé ?

— Nous n’avons pas vraiment abordé le sujet, mais je crois qu’il a compris qu’il ne devait pas m’obliger à déménager chez lui. De toute façon, avec ses chambres d’hôtes, il est assez occupé.

— Donc tu n’as pas l’idée de fonder une famille avec lui ?

Elle haussa les sourcils.

— En voilà une drôle de question. Non, je suis bien avec Enzo et la vie que je mène avec toi et Archibald me convient tout à fait. Je ne crois pas que j’arriverai à me détacher de vous deux.

— Et si Archibald tombait amoureux et s’en allait ?

Elle éclata de rire.

— Alors là, ce n’est pas demain la veille qu’il s’en aille.

Je notais qu’elle n’avait pas relevé s’il tombait amoureux. Elle baissa la voix et demanda :

— Et toi MarieSophe ? Tu as oublié Morgan ? Ton cœur est à nouveau libre pour sentir ce qu’il se passe autour de toi ?

— Tu parles de Gabriel ?

— Pas du tout. Lui, ça se voit qu’il en pince pour toi, mais pas toi.

Elle se tourna vers le groupe qui remballait leur table et leurs chaises et qui nous remerciait avec grand sourire de leur avoir permis de s’installer.

— À la semaine prochaine, nous crièrent-ils.

Mélusine les regarda s’en aller et me dit :

— Tu crois que nous devrions faire des frites la prochaine fois ?

— Je ne suis pas sûre que ça marcherait et le food truck n’est pas équipé pour ça. Il faudrait certainement d’autres autorisations.

Nous commençâmes à remballer et sans la regarder je lui racontai la rencontre faite avec le jeune couple Philippine et Georges.  

— Tu te rends compte, ils étaient meilleurs amis, et ils sont devenus mari et femme.

Mélusine ne répondit pas, mais je la vis sourire. Le silence s’installa. C’est elle qui la première reprit :

— Jamais Archibald n’avouera que ses sentiments pour toi ont évolué. Il a bien trop peur de casser quelque chose entre vous.

Ce fut mon tour de rester muette. Je n’avais donc pas rêvé. Archibald ne voyait pas en moi une amie, mais bien plus.

Mélusine posa sa main sur mon bras.

— Et toi MarieSophe ? Ne crois-tu pas que si tu n’as jamais voulu t’installer chez Morgan, c’est aussi à cause des sentiments que tu as pour Archi ? Réfléchis bien, sonde ton cœur, je suis certaine que tu as déjà la réponse. Rien que le fait d’avoir tenté de l’embrasser pour rigoler est une moitié de solution.

— Et si ça ne marchait pas ? Je le connais depuis tellement longtemps ?

— Et alors ?

— Tu ne penses pas que ça changerait quelque chose dans notre fonctionnement à tous les trois ?

— Je serai toujours votre amie, juste vous serez un couple, mais tu sais, tu vas devoir ramer pour qu’Archibald accepter de voir en toi autre chose qu’une amie. Il est fou amoureux de toi, ça se voit comme le nez au milieu de la figure, mais il ne tentera rien.

Nous avions terminé de ranger, nous pouvions repartir. Le retour se fit en silence. Quand nous arrivâmes devant la maison, Clémentine devait nous guetter derrière sa fenêtre. Elle sortit et je compris aussitôt qu’il se passait quelque chose.

— Charles a disparu. Il m’a dit qu’il allait chercher le pain comme d’habitude, Archibald ne l’a pas vu et personne du village non plus.

© Isabelle-Marie d’Angèle

À très vite…

Journal de Marie-Sophie

Bonjour toi 😉

Voici la suite du journal de Marie-Sophie. La voilà en Food truck et ça a l’air de bien marcher. Petite surprise ! J’ai invité deux de mes personnages d’une autre histoire, Philippine et Georges de la romance de Noël Noël à la maison des coeurs blessés.

Voilà, c’est fait, le Food-truck était à nous et Cybèle Iraola s’était envolée retrouver son homme. Nous sommes seuls maitres à bord.

Le planning établi par Archibald était tellement ultracarré que j’avais la frousse de me louper. Je n’étais pas fichue de respecter un plan, et il le savait le bougre. Quelle partie de rigolade nous avions eue lorsque j’avais pris le volant pour la première fois, histoire d’avoir l’engin bien en main. Archibald assis à la place du passager me guidait. Finalement, pas trop compliqué la conduite.

Jamais je n’aurai imaginé que nous aurions un tel succès. Évidemment, il n’y avait pas foule devant le comptoir, mais il n’était jamais resté vide et la curiosité des gens faisait plaisir à voir. Les personnes âgées étaient ravies d’avoir de la compagnie et les autres voulaient goûter à tout. En peu de temps, l’étal des fromages de chèvre avait été dévalisé, les baguettes d’Archibald étaient parties rapidement. Heureusement qu’il avait prévu des corbeilles remplies qu’il n’avait pas exposées pour pouvoir faire des sandwichs à la demande. À un moment donné, je voyais les Basques sortir de leur maison tout d’abord pour regarder. Nous étions sur la place du village, bien en vue. Archibald s’était occupé des autorisations, il ne voulait pas d’histoire avec d’éventuels collègues. Il avait bien vérifié qu’il n’y avait pas de boulangerie à qui il pourrait faire du tort sans le vouloir. Si bien que les gens étaient heureux de goûter son pain sans avoir à courir au supermarché qui était le plus prés.

Les habitants désiraient tout connaitre et surtout quand nous repasserions. Archibald avait établi un calendrier. Nous ne devions faire la tournée que 3 jours par semaine dans 3 villages. Ravis de savoir que nous reviendrons la semaine suivante, les clients s’interrogeaient, pouvaient-ils passer commande ? Pourquoi pas ? Comme j’avais l’habitude d’emporter un cahier pour des remarques glanées ici et là, je n’hésitais pas à noter les noms et les demandes. J’écrivis en rouge d’acheter un agenda, sinon j’allais m’emmêler les pinceaux.

Archibald avait affiché son adresse avec une photo de la boulangerie où il y avait ses coordonnées.

Lorsque je vis arriver le couple main dans la main, je pensais immédiatement qu’il faisait chic et je les enviais aussitôt. Archibald me fila un coup de coude et murmura à mon oreille :

— Des touristes, j’en mets ma main à couper.

— Pari tenu !

Nous regardions en souriant l’homme et la femme qui s’avançaient vers nous. Il était plus âgé qu’elle, mais qu’est-ce qu’il dégageait comme classe. Il ôta ses lunettes de soleil pour nous parler. Heureusement que j’étais dans le food truck parce qu’il devait au moins mesurer 1 m 90, Archibald devait être de la même taille.

Instantanément, je fus charmée par sa voix. Archibald fut plus rapide que lui :

— Bonjour, vous connaissez un peu mes produits ?

C’est elle qui répondit, avec ses yeux verts rieurs, elle était à croquer.

— Pas du tout, nous sommes en vacances.

En riant, Archibald et moi nous nous tapâmes dans la main en criant :

— Gagné !

Et tout aussitôt, mon ami s’excusa :

— Nous avions fait le pari que vous étiez des touristes !

Le couple éclata de rire également. Lui, dit en la prenant par les épaules :

— Philippine et moi, adorons aussi faire ce petit jeu.

— Oui, depuis le temps… depuis combien de temps on se connait, mon cœur ?

Surprise, mais ne pouvant pas être trop curieuse, je l’interrogeai :

— Pas des dizaines d’années quand même !

Il rit.

— Oh, ma Philippe, je l’ai vue grandir.

— Nous étions les meilleurs amis du monde avant de nous rendre compte qu’en fait, nous nous aimions d’amour.

Elle piqua un baiser sur les lèvres de son compagnon. Le silence s’installa. Elle dit alors :

— C’est Georges qui vous a surpris pour que vous restiez muets comme des carpes ?

Archibald retrouva aussitôt la parole et éluda la question en leur tendant une assiette avec des morceaux de pain.

— Goûtez-moi ça et dites-moi ce que vous en pensez.

Je les regardais avec envie. Ils semblaient si amoureux l’un de l’autre.

Ils bavardaient avec Archibald et lui demandèrent où se situait sa boulangerie. Ils étaient sur Biarritz au grand hôtel. Ils étaient d’une simplicité à couper le souffle et pourtant j’étais certaine qu’ils étaient pleins aux as. Il n’y avait qu’à voir la voiture garer sur la place. Une Porsche noire qui en jetait, on ne voyait qu’elle.

— Vous êtes là pour longtemps ? demandais-je

— Hélas non, Georges ne peut pas s’éloigner beaucoup à cause de son travail. N’est-ce pas mon cœur ?

Il lui fit un clin d’œil. Leur complicité n’était pas factice. J’étais sous le charme. Je regardais ce qu’ils avaient pris, les encaissais et leur souhaitais de belles vacances. Ils repartirent main dans la main. Archibald passa un bras autour de mes épaules.

— On s’est pas mal débrouillé non ? On remballe ?

J’acquiesçais de la tête. Il était temps de plier bagage, je tenais la boulangerie l’après-midi.

En faisant la route, assise à côté d’Archibald, je repensais à ce couple. Je me tournais vers Archi, j’ouvris la bouche pour lui en parler, mais il me coupa le sifflet par un :

— Oublie ! Ce serait une très mauvaise idée.

Est-ce qu’il penserait à la même chose que moi ? Cette Philippine et ce Georges étaient bien des amis d’enfance apparemment. J’aurais bien aimé les revoir et discuter avec elle et puis je haussai les épaules, je ne la connaissais pas après tout, elle n’allait pas me raconter sa vie. Je tentai de les oublier et me repassai la superbe matinée que nous venions de vivre.

© Isabelle-Marie d’Angèle (mai 2023).

À très vite…