Novembre et mois de l’écriture

Bonjour toi 😉

Me revoilou parmi vous avec ce mois de novembre qui commence🙂 et avec lui démarre le mois de l’écriture organisé par Kobo. Je rappelle qu’il faut écrire un petit texte de 250 à 750 signes avec un mot imposé. Le premier est tombé ce matin et c’est Bretagne.

Voici donc ma participation que tu retrouveras également sur Instagram.

Elle regardait par la fenêtre. Comment se séparer de ces côtes roses, des falaises, des vagues en contrebas qui la narguaient tous les jours ?

Elle savait qu’ils n’étaient plus tout jeunes. 80 ans ! elle ne comptait plus le nombre des années qu’ils étaient ensemble et qu’ils se promenaient main dans la main en bord de cette eau qui selon les endroits où ils allaient étaient mer ou océan. Leur fille revendiquait qu’ils habitaient trop loin d’elle. Le Sud-Ouest, sa chaleur et ses moustiques ne la faisaient pas rêver.

Il s’approcha d’elle et entoura ses épaules. Peut-être qu’il était temps, en effet, de prendre la bonne décision et de quitter leur Bretagne bien-aimée. Après tout, l’océan atlantique était là-bas aussi !

À très vite…

Jeux d’écriture

Bonjour toi 😉

Je reprends doucement l’écriture et pour ça, je me challenge toute seule. Voici donc un tirage de mots aléatoires :

Et mon texte que je me suis amusée à écrire en rimes.

Histoire dans la basse -cour

Cocotte la poulette
Faisait sa toilette.
Le coq, pas besoin de lunettes
La lorgnait depuis belle lurette.

Cocotte avait lu dans un magazine
Sur les conseils de la poule noire, sa cousine
Qu’elle devait lisser ses couleurs pour avoir bonne mine
Elle aimait bien sa cousine Jasmine.

Monsieur Coq approcha la rebelle
Qu’il trouvait de plus en plus belle
Doucement, il écarta ses ailes
Et respira son parfum de miel.

Elle s’échappa en caquetant
Quelle aiguille la pique ! pensa-t-il en maugréant
Je ne suis pas méchant pourtant
Elle devrait le savoir depuis le temps.

© Isabelle-Marie d’Angèle (septembre 2024).
À très vite…

Une idée de génie

Bonjour toi 😉

Quand il me prend l’idée d’écrire sur un chiffre, ici c’est le 5, voilà ce que ça donne. Quand je me relis, je me demande comment je fais pour avoir toute cette imagination. Je sais que le texte est un peu long mais va jusqu’au bout, je suis certaine que tu voudras connaitre la fin 😁 et je te rappelle que je suis très bavarde 😏.

Fleur en avait assez. Le chiffre cinq lui donnait la nausée. Tout tournait autour : sa naissance le 5 octobre d’où son prénom Fleur. Il fallait le porter ce prénom !

Mariée un cinq juillet avec Antoine, jour de sa fête. Cinq filles, deux fois des jumelles, et une toute seule, elle se demandait encore pourquoi aujourd’hui, toutes arrivées un cinq du mois : 5 novembre, Sylvie et Élisabeth, 5 février Agathe et Adélaïde, et Judith le 5 mai, et clin d’œil du calendrier, toutes le jour de leur fête. Cinq ans de mariage, habite au n° 5 de la rue des cinq sens. Ajouter à ça, qu’il fallait manger 5 fruits et 5 légumes, Fleur en avait ras la casquette..

Ce matin dans sa cuisine, après avoir conduit ses gamines à la maternelle et la petite dernière chez la nounou, elle souffla et se fit un café.

 Que se serait-il passé si le 5 n’existait pas ?  murmura-t-elle en se souriant dans le miroir en face d’elle.

— Je vois qu’on a besoin de moi.

Une voix grave venant du salon la fit sursauter.

— Qui est là ?

— Moi, vous m’avez appelé, me voici ! Mais aidez-moi à m’extirper de ce satané bouquin tout froissé.

Fleur avança prudemment, sa tasse à la main.

— C’est pour aujourd’hui ou pour demain ? s’énervait la voix.

Elle posa son café sur la table basse et s’approcha, souleva le livre abandonné et recula, effrayée. Un gigantesque homme bleu se déplia devant elle. Il lui était familier. Impossible ! Il ne pouvait pas être…

— Votre bon génie pour vous servir !

Fleur se laissa choir sur le divan, stupéfaite.

— Hé ! Ma p’tite dame, je n’ai pas que ça à faire moi, vous m’avez appelé, je suis là.

— Mais… Vous ne pouvez pas exister !

— Ah que si ! Touchez-moi donc !

— Et… votre lampe ? Quelle question idiote, j’avoue !

— Dépassé ça ma p’tite dame ! alors, votre vœu ? demanda-t-il en se frottant les mains.

— Un vœu ? Je n’ai qu’un vœu ?

Il éclata de rire.

— C’est bien ça les femmes, jamais contentes ! Je n’existe pas et finalement elles se disent Pourquoi pas ? Plusieurs vœux, ce serait bien ! Et bien non, c’est la crise, restriction budgétaire, un seul souhait !

Fleur n’en revenait toujours pas. Le génie dans son salon ! quand elle raconterait ça aux filles, personne ne la croirait et ils la prendraient pour une folle.

Il commençait à s’impatienter.

— Que vous demande-t-on d’habitude ?

— L’argent, être beau, un corps de rêve, tomber amoureux, la liste est longue.

— Et ça marche ?

— Ben oui, vous me prenez pour qui ? J’ai les diplômes, non, mais vous croyez qu’on recrute comme ça, vous ? Ils exigent des qualifications maintenant.

— Je ne savais pas qu’il y avait un diplôme Génie, génie civil, mécanique, je connais, mais génie tout court, je sèche !

— On va passer la journée à déblatérer sur la paperasse, c’est bien ma veine, il a fallu que je tombe sur une revendicatrice. Vous êtes syndiquée ?

— Non, non, ce n’est pas ça, mais je suis tellement surprise.

— J’ai compris, mais votre vœu, ça vient ?

— Je ne sais pas ce que je veux.

Il la regarda.

— En fait vous avez tout : argent, vous n’êtes pas moche, vous êtes amoureuse.

Il énumérait sur ses doigts en sifflotant.

— Pourquoi m’avez-vous appelé alors ?

— Je n’ai rien fait, j’ai parlé à voix haute.

— Un peu jeune non pour la maladie d’Alzheimer ?

— Mettez-vous un peu à ma place, un génie qui débarque dans mon salon ça n’arrive pas tous les jours.

— J’aimerais bien me mettre à votre place.

— Comment êtes-vous devenu génie ?

— Trop longue histoire.

— Pourquoi dîtes-vous que vous aimeriez être à ma place ?

— Vous m’avez bien regardé ? Je suis gros et bleu ! Vous êtes toute jolie, et vous êtes une femme, j’aurais aimé être une femme.

— Vous avez toujours été génie ?

Fleur s’était assise sur le canapé et bavardait naturellement avec le génie sorti du livre de sa fille. Lui se déplaçait en survolant les chaises, les fauteuils, les meubles. Elle le suivait du regard, ébahie.

— Voulez-vous du café ?

Elle se saisit de sa tasse et partit vers la cuisine. Il lui emboita le pas.

— Je ne bois pas, je ne mange pas. Je ne peux pas !

— C’est triste non ?

— On s’y fait !

Fleur se resservit du café, il était encore chaud.

— Alors votre vœu ? Franchement, je n’ai pas que ça à faire.

— J’aimerais que le chiffre cinq disparaisse !

Il manqua s’étouffer, vira au rouge, se dégonfla, se regonfla, bomba le torse :

— On ne me l’avait jamais faite celle-là ! Vous êtes certaine de ce que vous voulez ? C’est bizarre comme demande, mais si c’est ça votre vœu, allons-y !

Il enfla comme une tornade et s’envola.

Seule dans sa cuisine, Fleur buvait son café.

On sonna à la porte. C’était le facteur.

— Bonjour, madame, qu’est-il arrivé à votre numéro ? Encore un coup de ces petits chenapans, je l’avais dit qu’il fallait les surveiller, mais on me répond il faut bien que jeunesse se fasse !  voilà le résultat. Vous préviendrez votre mari, il va être content !

Fleur dévisageait avec stupeur l’homme en face d’elle.

— Vous êtes toute pâle, ça ne va pas ?

— Je pensais que vous aviez été muté.

Il éclata de rire.

— J’ai déposé mon dossier, il y a juste un mois, vous connaissez la lenteur de l’administration, et puis il manque encore un papier.

— Mais hier, votre collègue… balbutia Fleur

— Vous allez bien, madame ?

Le facteur la dévisageait, inquiet.

— Je fais toujours la même tournée depuis plusieurs années quand même, on croit connaître les gens, mais finalement, on se trompe, bougonna-t-il. Pensez à votre numéro, vous n’êtes plus en règle là.

Il enfourcha son vélo et disparut au coin de la rue laissant Fleur abasourdie.

Son portable sonna.

— Chérie, tu t’occupes des enfants, mon rendez-vous dure plus longtemps que prévu, je risque d’être en retard.

— Mais Antoine, tu…

— Antoine ?

Silence au bout du fil.

— Fleur, tu es toujours là ? C’est Florent à l’appareil, ne me dis pas qu’Antoine qui t’appelle ma chérie est revenu ?

Il raccrocha.

Florent ? Fleur regarda sa pendule. Nom de nom, plus de chiffre 5. Elle s’empara du calendrier. Plus de 5. Donc Antoine né le 5 juillet n’existait pas. Ah, mais Florent oui, le 4.

— Qu’est-ce que j’ai fait ?

Elle se mit à crier et à appeler partout dans la maison  :

— Génie, je me suis trompée. Je n’ai pas répondu à la question, si c’était vraiment mon vœu, ça ne compte pas, revenez, je vous en prie.

Elle éclata en sanglots, tapa du pied, s’arracha les cheveux, la crise de nerfs n’était pas loin. Elle chercha le livre abandonné sur le divan, il avait disparu. Elle grimpa quatre à quatre dans la chambre des enfants et respira mieux, les lits, les jouets étaient toujours en bazar.

Ne sachant plus quelle heure il était, elle redescendit l’escalier, bondit hors de la maison, monta dans son minibus et fila vers la maternelle. Un attroupement devant l’école la rassura, elle n’était pas en retard, le portail s’ouvrait. Après avoir garé sa voiture, elle s’engouffra dans le hall, essayant d’éviter les mamans qui la connaissaient, pressée de retrouver ses filles.

— Ohé Fleur, tu es distraite ! La classe de tes gamines, c’est là, moyenne section, je sais bien qu’elles sont en avance, mais quand même !

La mauvaise copine, celle qui est au courant de tout sur tout, qui voit tout, l’apostropha, mais la jeune femme ne lui répondit pas et fixa la liste des élèves affichée sur la porte : Pas de Sylvie ni d’Élisabeth, mais Charline et Jessy nées le 4 novembre. Elle pâlit devant les mines bien connues des petites qui se jetaient dans ses bras en criant :

— Maman, Maman, vite on va chercher Véro et Bérénice.

 Fleur se laissa emporter par ses deux gamines de quatre ans dans la classe d’à côté. Même scénario : un œil sur la liste, Véronique et Bérénice, nées le 4 février. Quatre fillettes de prénoms inconnus pour elle, un cauchemar, mais pas pour ses pitchounettes qui tendaient bras, bonnets, écharpes, sacs et doudous, la routine quoi ! Mais qui était qui ? Visages identiques comme ce matin pourtant, réfléchis Fleur, tu es leur maman quand même ! La jeune femme se sermonnait intérieurement.

Elles montèrent toutes dans le minibus, Fleur les attacha. Elles babillaient comme d’habitude.

— Tu as préparé quoi pour le goûter ?

— Attendez les filles, on va chercher Judith, votre petite…

— C’est qui ?

Quatre voix à l’unisson la firent piler net au milieu de la route. Un coup de klaxon furieux résonna, elle sursauta. Fleur réalisa alors avec horreur l’étendue de sa bêtise. On ne pouvait pas changer le monde comme ça d’un coup de baguette magique. Sa petite fille, son bébé, n’existait pas, elle n’était pas née, mais naîtrait-elle un jour ? La question pour l’instant n’avait pas lieu d’être, elle avait des priorités bien plus urgentes. Le cours de sa vie avait pris un tournant différent.

— Pourquoi tu pleures ?

Ses quatre fillettes, inquiètes, la fixaient dans le rétroviseur.

— Je ne pleure pas, allez on rentre à la maison.

Devant chez elle, elle réussit à plaisanter en les détachant, l’une après l’autre.

— Papa, papa…

Fleur n’osait pas se retourner. Son mari était déjà rentré. Les filles par contre, ravies, lui sautaient dans les bras.

— On va goûter maman ?

Une petite main se glissait dans la sienne et la serrait contre sa joue.

— Oui, oui, j’arrive.

— Laissez maman. Rentrez à la maison, rangez vos affaires nous arrivons ! Florent s’approchait de sa femme qui n’osait pas le regarder. Quand elle leva les yeux, elle vit son mari — Dieu soit loué, c’était le même homme que ce matin — mais il avait sa tête des mauvais jours.

— Tu peux me dire ce qu’il se passe ?

— Je…

— Je comprends que tu sois fatiguée, demain c’est samedi, je m’occupe de tout, et…

— Vendredi

— Pardon ?

— Demain, on est vendredi.

— Je n’en connais qu’un de vendredi, c’est l’ami de Robinson, demain on est samedi. Enfin Fleur, tu ne vas pas bien, après jeudi, c’est samedi, ça a toujours été comme ça !

Fleur regarda son mari, éperdue.

— Tu me parles d’Antoine ?

Elle l’avait oublié celui-là !

— Il est revenu, je le savais !

— Mais de qui tu parles ?

— Antoine ! Il est revenu ?

— Mais non !

Florent haussa les épaules et entra dans la maison. Les filles piaffaient d’impatience :

— Le goûter, le goûter !

— Tu es rentré bien tôt. Je croyais que…

— J’ai abrégé ma réunion. Ton Antoine m’a perturbé.

— Je t’assure que…

— Il était là ce matin, pas vrai ? Sinon, tu expliques pourquoi tu m’aurais appelé Antoine ?

Fleur préféra ne pas répondre et commença à sortir du réfrigérateur, yaourts, compotes, devant ses filles. Si en plus, son ex, Antoine revenait, alors, c’était la catastrophe !

— Vous êtes contente ?

Fleur se retourna.

— Vous rendez-vous compte du bazar que vous avez provoqué ? À cause de vous, plus de RTT le vendredi, on est repassé aux 39 heures, j’ai tous les syndicats sur le dos en plus d’un avertissement. Il paraît que j’aurais dû refuser votre demande. Ohé, la p’tite dame, on se réveille, je vous parle !

Fleur regardait autour d’elle. Arrêt sur image comme à la télé : Florent, bras tendu pour attraper une bouteille de jus de fruits, ses filles muettes pour une fois, assises à la table.

— Je suis désolée. Mais… iIs vont redevenir comme avant n’est-ce pas ?

— Elle est désolée, mima le génie, non, mais je rêve ! On fait quoi, là, maintenant ? Oui, ne vous inquiétez pas, ils ne se souviendront de rien pour répondre à votre question.

— On peut revenir en arrière ? Vous aviez l’air tout gentil ce matin.

— Ben voyons, vous n’aviez droit qu’à un vœu, je vous rappelle.

— Il ne compte pas, je n’avais pas donné mon accord.

— Elle est bien bonne celle-là !

— C’est vrai, vous avez dit : vous êtes certaine de ce que vous voulez ? C’est bizarre comme demande, mais si c’est ça votre vœu, allons-y  et vous avez disparu.

Le génie sortit de nulle part une tablette et fit défiler les images. Fleur regardait par-dessus son épaule.

— Tst, tst, secret défense ! On ne copie pas. Curieuse en plus !

Il rangea sa tablette.

— Okay, j’ai fait une erreur.

— Ah vous voyez que j’avais raison !

Le génie se gratta la tête.

— C’est que… Il faut que ça passe en conseil, je ne peux pas décider tout seul.

— Vous êtes mon bon génie non ?

— Heu oui… mais stagiaire ! En fait, je n’aurais pas dû venir tout seul et intervenir sans mon tuteur, mais il était occupé ailleurs.

— Vous avez voulu faire du zèle, c’est malin !

Le génie se mit alors à pleurer et de grosses larmes bleues roulèrent sur ses joues. Fleur ne savait plus quoi faire. C’est alors que Florent et les filles se remirent en mouvement :

— C’est qui lui ? demanda Jessy en pointant son doigt vers le génie.

— Tu es le génie d’Aladin ? Tu vois que ça existe.

Bérénice se mit à l’embrasser et l’attraper par le cou. Ses sœurs se joignirent à elle pour faire la ronde. Celui-ci leva les yeux au ciel, il ne comprenait plus rien. Normalement, seule Fleur devait connaitre son existence, il avait vraiment dérapé. Il allait se faire virer, c’était certain ! En tout cas, il profitait de l’aubaine et dansait avec les petites, c’était toujours ça de pris ! Elle n’était pas facile la vie de génie ! Quoiqu’on en pense !

Florent, les yeux écarquillés, regardait ébahi ses filles avec une tornade bleue.

— Tu m’expliques ?

Et Fleur raconta, le ras-le-bol, le chiffre cinq.

— Arrête tes bêtises Fleur, un génie ça n’existe pas, et…

— La preuve !

— Laisse-moi continuer. Tu me parles de cinq, je ne comprends rien de ce que tu me racontes.

— Évidemment.

— Quoi évidemment ? Tu te moques de moi en plus ?

— Le chiffre 5 a disparu, tu ne peux pas le connaître.

 Elle éclata de rire, mais c’était nerveux et son mari n’avait pas l’air d’apprécier.

Ils ne s’en sortiraient jamais et Fleur ne parla même pas de leur petite Judith.

— On en fait quoi de lui ? demanda Florent en désignant le bonhomme bleu.

Un cri unanime de ses filles :

— Il reste avec nous !

— Dis oui maman !

— Dis oui maman, répéta le génie en sautant de plus en plus haut au grand plaisir des jumelles.

Une fois revenu au sol et tenu par la main, les enfants imploraient les parents du regard. La situation échappait complètement à Fleur.

— J’ai peut-être la solution.

Nouvel arrêt sur image. Fleur sentait la migraine monter.

— Vous venez avec moi, vous expliquez au chef ce qui s’est passé et on verra bien si votre histoire est acceptée. Je vous préviens, ce n’est pas un facile le chef !

— Où devrais-je aller avec vous ?

— Au pays des génies pardi !

— Excusez-moi, je n’ai pas vraiment l’habitude de discuter avec un génie tous les jours.

Fleur commençait à s’énerver.

— Elle raisonne en plus ! Elle me met dans une panade pas possible et elle la ramène. S’il vous plait, je veux vous aider et moi aussi par la même occasion.

Il était pathétique, les coudes sur les genoux dodelinant de la tête.

— Pendant combien de temps ?

— Le temps n’existe pas dans mon pays.

— Et ma famille ? Comment va-t-elle réagir en mon absence ? Qui va s’occuper des enfants ?

— Ne vous en faites pas pour ça, personne n’est indispensable, vous le savez bien.

— Merci, sympa.

Fleur ne savait pas quoi faire.

— Pressez-vous maintenant, je ne vais bientôt plus pouvoir agir !

Fleur haussa les épaules, elle n’avait pas le choix, il fallait bien que tout ça s’arrange. Tout était arrivé par sa faute, à elle de réparer. Elle joignit sa main à celle du génie.

On tambourinait à la porte.

Fleur était dans sa cuisine, une tasse de café à la main. Elle se leva et posa le mug sur le plan de travail, c’était le facteur.

— Votre courrier. Une signature, là !

Elle le regarda, c’était l’homme habituel. Elle n’osa pas lui parler, il avait l’air de mauvaise humeur. C’est vrai qu’elle ne l’avait pas reconnu, l’autre jour. En fait c’était quand ? Mais…

après son départ, elle courut dans la chambre de ses filles. Tout était normal. Elle vérifia les photographies, cinq filles ! Elle vérifia sa montre et respira d’aise. Elle avait rêvé. C’était tellement réel quand même. Elle sourit et se dit que la vie était belle finalement et quelle idée saugrenue elle avait eue. Au fait, c’était quand ? Ce matin ? Elle s’y perdait un peu.

À nouveau son portable. Elle redescendit l’escalier.

— Chérie, c’est moi, pourrais-tu récupérer les filles, je suis retenu au boulot par une réunion imprévue ?

— Oui, oui.

— Merci chérie et à ce soir.

Perplexe, Fleur avait une sensation de déjà-vu. Elle posa son téléphone et regarda une fois encore l’heure. Elle avait un peu de temps avant de partir chercher les enfants. Elle jeta alors un œil sur le recommandé et se demanda ce que cela pouvait être. Elle déchira l’enveloppe.

— C’est une blague ?

— Pas du tout, Fleur. Il y a votre signature là en bas du document. C’est un contrat en bonne et due forme que vous avez accepté afin d’annuler le vœu précédent, accordé par excès de zèle de votre génie en formation. Vous êtes nommée Génie 5e classe et vous devrez intervenir cinq fois pour réaliser cinq vœux en cinq mois.

L’homme en face d’elle était apparu dès l’ouverture du courrier.

— C’est normal que vous ne vous rappeliez de rien, mais je vous certifie que c’est bien votre signature.

— Qui êtes-vous ? Où est mon génie ?

— Je suis le chef de…

— Ah oui, le chef pas facile !

— Pardon ?

— Oubliez ce que j’ai dit. Donc, vous êtes le grand chef de tous les génies, au pays des génies.

— Je comprends que vous ayez du mal à y croire, c’est pourtant vrai.

— Je vais avoir droit à une formation ?

— Vous l’avez déjà eue !

— Je ne m’en rappelle pas.

— Ne vous inquiétez pas, quand ça sera le moment, vous vous en souviendrez.

— Mais je ne suis pas un génie moi !

— J’ai bien cru que tu n’allais jamais la dire cette satanée phrase ! Mais si ma chérie, tu es mon génie à moi, bravo ! bravo ! tu as participé au jeu Une idée de génie.

Fleur abasourdie regarda son salon envahi peu à peu de techniciens et cameramen qui applaudissaient en riant et venaient la féliciter et l’embrasser. Son mari lui tendait les bras, elle s’y blottit sans trop comprendre encore ce qui se passait. N’était-il pas au bureau ?

— Tu es super jolie maman.

— Tu as vu, moi aussi je suis à la télé.

Les fillettes étaient très excitées devant le petit écran. L’émission venait d’être diffusée et bien sûr avait été enregistrée afin de la passer et repasser en boucle, c’était le début de la gloire croyaient-elles.

Fleur commentait :

— C’est bien filmé, j’avoue ne m’être aperçue de rien, des vrais professionnels ! Mais quand même Antoine, il a fallu que les maîtresses à l’école soient dans le coup pour que les prénoms des filles aient été changés, la panique quand j’ai découvert des noms différents ! D’ailleurs, je n’ai pas vu cette séquence, peut-être que ce n’était pas terrible surtout avec l’intervention de la commère de service. Ah ! elle aurait été ravie, elle, de passer à la télé. Elle aurait débarqué ici, aurait minaudé et fait sa belle.

— De quoi parles-tu ? demanda son mari, surpris. N’exagère pas, on a tourné seulement dans la maison, tu n’imagines pas tout le stress pour que tu ne te rendes compte de rien.

— Hum, Hum, tu ne veux pas tout me dire, je comprends.

Fleur attrapa alors le livre d’Aladin qui allait glisser sur le tapis. Elle l’ouvrit et reçut en plein visage le clin d’œil du génie articulant qui est le génie finalement ?

© Isabelle-Marie d’Angèle (septembre 2024).

Agenda ironique de Juin – Les commères sont de sortie

Bonjour toi 😉

Déjà le nouvel agenda ironique ! il se passe chez Sabrina ici ou tout est bien expliqué 😁enfin je crois que j’ai compris 😂. Elle dit tout ça 👇

Je vous propose de mettre à l’honneur des gens ordinaires, (Normal people), leurs tracas, leurs tralalas, leurs tragédies comme il vous chante, un matin de changement ! Comédie musicale, extrait théâtral, composition florale… Vous choisissez la catégorie de votre épreuve !

Mais il faudra dans tous les cas, créer au moins une locution introuvable (à la manière de l’OULIPO) à partir d’expression et locutions déjà connues (ex : avoir la tête dans le guidon + la balle est dans ton camp = avoir la tête dans ton camp… ou la balle est dans le guidon…).

Et aussi 👇

Voici donc ma participation :

Les commères sont de sortie

— Dis-moi Germaine…

Voilà que ça recommençait ! Assises toutes les deux sur le banc de la place, face au bar-tabac presse et à la boulangerie, Alice et Germaine regardaient la vie des gens.

Non pas qu’elles n’en avaient pas, elles, de vies, mais dotées d’une langue de vipère indescriptible, enfin surtout Alice. Pour être de mauvaise foi, si si, de mauvaise foi, ça elles l’étaient. Il n’y en avait pas une pour rattraper l’autre et surtout rapporter n’importe quoi. Elles étaient les reines de la Rumeur, peut-être même que c’était elles qui avaient inventer le mot.

Que ce soit ici sur la place ou devant leur porte-fenêtre, elles ne cessaient de blablater. Elles étaient amies depuis… Houla, ma p’tite dame, depuis belle lurette. Quand on leur demandait, l’une, Germaine, répondait que c’était depuis le jour où le bouilleur de cru avait déballé son matériel devant l’église. Y a pas idée de distiller du whisky devant une église ! Mais si c’était du whisky, y avait qu’à voir l’Antoine qui rien qu’à le respirer, il était saoul comme une barrique.

L’autre, Alice, que ça datait de l’époque où elle avait le temps de bâiller aux chats, parce qu’y a pas à dire, les chiens ne font pas des corneilles, c’est bien connu !

— Dis-moi Germaine… c’est pas la femme d’Antoine là-bas ? Elle serait pas allée chez le coiffeur par hasard ?

Alice se penchait pour bien voir.

— Même qu’il va y avoir du rififi, regarde son homme, il a pas l’air d’aimer ça. A-t-on idée aussi de se faire couper les cheveux aussi courts et friser en plus, on dirait le caniche d’Albert, répondit Germaine.

— Tiens, le livreur qui porte des fleurs. Pour qui à ton avis ?

— Pas à toi en tout cas, ricana Germaine, ce qui eut le don d’agacer Alice.

— Toi non plus, tu n’as jamais reçu de fleurs que je sache, grinça-t-elle.

Ne jamais aborder ce sujet de discorde qui durait depuis des années. Depuis que… L’ Antoine avait choisi l’autre… Germaine et Alice étaient sur les rangs, mais il avait préféré la blonde, enfin elle était grise aujourd’hui… frisée, mais grise quand même.

— Quand même, il avait eu un sacré toupet d’offrir des perce-neiges, je savais pas qu’on pouvait en faire un bouquet. Et puis des perce-neiges en été, jamais vu ça !

— Normal, c’en était pas. C’était des narcisses.

— Ouais, ben il risque pas de tomber amoureux de son reflet, l’Antoine !

Elles s’esclaffèrent tant et si bien qu’elles faillirent tomber du banc. Elles ne virent pas débouler Antoine furieux, qui en avait ras le bol de voir tous les jours ces commères devant sa boutique. Il les apostropha :

— J’en suis reconnaissant, car je sais maintenant où regarder pour répondre à l’inévitable question […] ça va encore durer longtemps ?

Stupéfaites, les deux femmes dirent en même temps !

— Mais t’es pas tombé sur la tête toi ? C’est quoi cette phrase à dormir debout ? Fais pas ton malin, hein Antoine ! On le sait que t’es allé à l’école jusqu’au certificat !

© Isabelle-Marie d’Angèle (agenda ironique Juin 2024).

À très vite…

Agenda ironique de Mai

Bonjour toi 😉

Voici venu le temps de l’agenda ironique. Il se passe ce mois-ci chez JoBougon , voici un extrait du thème et vous trouverez tout bien expliqué ici.

Voici donc ma participation 👇

Lorsque Dame Liberté se trouva face à la prison de Nantes l’ann didou didou d’ann, les mains attachées, elle en fut fort marrie.

Le geôlier encore bien davantage, l’ann didou didou d’ann.

— Fichtre ! si je m’attendais ! Vous ici ? Mais qu’avez-vous donc fait pour vous trouver ainsi emprisonnée ?

 — Mon pauvre ami, sur le pont j’ai trop dansé, l’ann didou didou d’ann,.

— J’ai connu une Dame Cigale, corbleu ! elle avait trop chanté.

Tous deux avançaient vers la geôle attribuée à Dame Liberté. Il ne faisait pas très clair, l’air était froid et humide.

— Vous ne serez pas seule, deux femmes ont été amenées aux aurores. L’une clamait que nous étions tous égaux, l’autre que nous étions frères. Quel grabuge morbleu, sur la place publique. Elles n’ont pas été pendues, mais peu s’en fallut. Dame Constitution s’en est mêlée et les a mises au cachot. Elle devait réfléchir. Vous devriez peut-être la rencontrer.

Le geôlier sortit le trousseau de clefs. Le bruit de ferraille dans la serrure rouillée arracha des cris aux prisonnières qui sommeillaient.

— Entrez Dame Liberté, je vais de ce pas demander audience à Dame Constitution.

Dame Liberté se frotta les poignets, enfin détachés, et contempla ses comparses de prison.

— Liberté est votre nom ? demanda l’une. Moi, c’est Fraternité et voici ma cousine Égalité. Ne pensez-vous pas que nous pourrions nous allier ?

Dame Liberté réfléchit. Elle se voyait bien flottant au vent sur des banderoles ou gravé sur des murs.

— Liberté, Égalité, Fraternité, murmura-t-elle.

— Nous pourrions traverser les siècles, qu’en pensez-vous ? insista Dame Fraternité.

— Sans être bannies ? osa dire Dame Égalité qui était peu bavarde.

— Toujours respectées ? continua Dame Fraternité.

— Ce serait merveilleux, murmura Dame Égalité.

— L’une d’entre vous connait-elle Dame Constitution ? Espérons que notre bonhomme de tout à l’heure aura gain de cause.

C’était dans une prison de Nantes, l’ann didou didou d’ann, y avait trois prisonnières. 
Liberté, Égalité, Fraternité l’ann didou didou d’ann
Constitution vint les voir l’ann didou didou d’ann
Et les lia à jamais l’ann didou didou d’ann
Gravées sur le papier l’ann didou didou d’ann
Elles traversent les années l’ann didou didou d’ann.
On en parle encore aujourd’hui l’ann didou didou d’ann.

© Isabelle-Marie d’Angèle ( agenda ironique mai 2024)

Toutes les participations sont les bienvenues et n’hésite pas à aller lire les agendistesironiques ici.

À très vite…

Va et Vient n°13

Bonjour toi 😉

Déjà un mois de passé et me revoilà avec une nouvelle invitée pour ce Va et Vient n°13 dont le thème est L’invention d’un hasard.

Dans la lignée des « Vases communicants », ce Va-et-Vient reprend le même schéma de communication, à savoir un échange entre personnes qui écrivent un texte (avec ou sans illustration) sur le blog d’une autre. Ce jeu littéraire paraît tous les premiers vendredis du mois. 

J’ai ainsi le plaisir d’accueillir Amelie Gressier qui publiera ma contribution La passion de Julie sur son blog Plume dans la main ici.

Voici sa participation 👇

Bien sûr qu’il y a d’autres participations que tu peux aller découvrir, ainsi Dominique Hasselmann du blog Métronomiques ici partage avec Marie-Christine Grimard du blog Promenades ailleurs ici, Dominique Autrou du blog La distance au personnage ici partage avec Jérôme Decoux du blog Carnets Paresseux ici .

Toutes les participations sont les bienvenues pour le prochain Va et Vient dont le thème est L’absence imprévue. Il sera publié le premier vendredi du mois de Juin, soit le 7.

Merci Amélie d’être passée chez moi, j’ai été ravie de t’accueillir.

À très vite…

Jeudi Poésie

Bonjour toi 😉

J’aime les acrostiches, ici, c’était ma participation pour le Va-et-vient du mois dernier, où le thème était la complicité.

Complices, enfants ils
Ont fait les quatre cents coups,
Mais les années ont passé
Parce qu’ils n’avaient plus les mêmes idées
La vie les a séparés.
Il a fallu que le hasard s’en mêle ou
C’était un rendez-vous
Il l’a reconnue alors qu’il braquait une banque
Tétanisée, elle appuya pourtant sur l’alarme, mais
Éteignit les caméras et
Sans réfléchir, lui prit la main et s’enfuit avec lui.

© Isabelle-Marie d’Angèle
À très vite…

Agenda ironique – Avril 2024

Bonjour toi 😉

C’est ici que ça se passe chez Carnets Paresseux . Les mots imposés sont :

Tu l’as compris, il va s’agir de poisson 😁 et puis il y aura une phrase au choix à glisser :

d’ici à là, y a quoi, tu crois ? juste assez, où presque…» qui pourra s’achever sur un ? ou un . ou un ; ou trois …
L’autre ? « Xénophon rapporte qu’Alexandre pleura quand il eut achevé la conquête du monde. Tamerlan et Attila, eux, pas une larme. »
les plus intrépides pourront placer les deux phrases, ou plusieurs fois l’une, ou plusieurs fois les deux. Mais sans exagérer.

Chez Carnets Paresseux tout est bien expliqué 😉 et même qu’il proposera chaque dimanche un petit truc en plus, pour s’il y a des amateurs qui voudraient tenter le feuilletonnage. Sinon, poème, recette, conte, épistolage, tout est formellement possible et attendu.

Voici donc ma participation 👇 et tu peux le faire toi aussi bien sûr, plus on est de fous plus on s’amuse 😉.

Gaston le petit poisson bleu tournait en rond dans son aquarium. Il ne pouvait pas se plaindre, il était magnifique. Des herbes par-ci, des cailloux par-là qui faisaient office de grotte, son eau changée régulièrement et sa nourriture distribuée à heure fixe.

Oui, mais voilà, il en avait ras le cocotier de tourner en rond dans sa boutique. Il était tout seul, il ne bavardait avec personne, à part à son double quand il se regardait dans sa vitre, tu parles d’une discussion. Il faisait les mêmes gestes que lui quand il remuait sa queue et de même lorsqu’il ouvrait la bouche, des bulles identiques en sortaient.

Il avait appris à s’asseoir comme un humain dans une roche qui ressemblait à un fauteuil. Si sa queue pouvait être plus longue, ce serait mieux, mais bon, il ne pouvait rien changer à sa vie.

Ce n’est pas parce qu’il habitait Vierzon qu’il ne pouvait pas rêver. D’ailleurs, une chanson l’avait rendue célèbre sa ville, la copine de Jacques Brel voulait le voir, alors ! OK, ce n’était pas Paris, mais quand même ! Il y avait un beau bassin dans lequel il aurait adoré s’y plonger.

Tiens… c’est bizarre, ce n’était pas Gaspard qui venait… ah non, c’était la femme de ménage, elle ne l’aimait pas celle-là ! Quand elle devait nettoyer sa maison, elle soufflait comme un bœuf et Gaston filait se cacher pour éviter ses grosses mains. Allons bon, c’est elle qui allait lui donner à manger, elle n’y connaissait rien. Et paf ! (pas le chien), la boite tomba dans l’aquarium et toutes les graines s’éparpillèrent. Elle rit, pas Gaston. D’ailleurs comment pourrait-il ? Ça rit un poisson ? Dans les dessins animés, oui, avec leurs énormes dents qui font peur, mais Gaspard était tout petit et il n’était pas représentant en dentifrice.

Gaston s’approcha de la boite.

– Vas-y, toi qui rêves de partir, je t’en offre la possibilité.

Ce ne fut pas ses dents à Gaspard qu’on vit, mais plutôt ses yeux qui s’élargirent grands comme des soucoupes. Une boite qui parlait, et dans l’eau en plus.

– Nom d’une rhubarbe, tu m’ouvres !

– C’est quoi une rhubarbe ?

Gaspard n’en croyait pas ses branchies, il parlait ! Il avait une jolie voix en plus !

– T’occupe ! ouvre, je te dis !

– Comment veux-tu que je fasse ? Tu as la notice ?

Et toc !

– Pas faux !

Prise d’une paresse subite, la boite souffla ! C’est que l’eau trempait son carton, elle ne se sentait pas bien. D’ici qu’il faille appeler les pompiers pour la ranimer ! Elle déraillait complètement, ils ne se dérangeront jamais pour elle. Alors, elle se tourna, retourna, se secoua et…

Gaston n’y crut pas. Son aquarium grandit grandit encore et… lui aussi. Il put passer la tête hors de l’eau, il put même respirer et ce n’était pas tout, une longue queue magnifique s’étalait. Impensable, il était devenu une sirène, lui, le petit poisson bleu. La boite avait disparu, et… la femme de ménage qui déboulait dans le salon hurla en voyant le carnage. Elle détala en criant qu’il y avait une sirène dans la maison de ses maîtres.

– Quelle sirène, s’étonna le voisin, je n’entends rien. Vous avez appelé les pompiers ? Il y a le feu ?

– Ce serait plutôt une inondation, réagit la voisine, regardez-moi ça, d’où vient toute cette eau ?

La femme de ménage se jeta sur le taxiphone au bout de la rue pour bigophoner à la police. Elle n’arrivait pas en placer une, et l’homme au bout du fil la prit pour une folle.

– Donnez-moi l’adresse s’il vous plait !

– Je pense que d’ici à là, y a quoi, tu crois ?

– On se connait, que vous me tutoyez ?

– Juste assez, où presque…

– On se connait ou pas ? Ou c’est oui, ou c’est…

– Je pense à un ou deux kilomètres. Mais, je ne sais pas nager. Vous devriez venir en canoë.

– C’est ça et vous apporter une bouée tant que j’y suis.

– Oui, ce serait gentil.

– Bon, ça suffit, madame, j’ai franchement autre chose à faire que de vous écouter.

Médusée, la femme de ménage resta avec son combiné à la main alors que l’eau montait de plus en plus. Allons bon, la sirène qui se mettait à chanter maintenant !

Ce qu’elle ne vit pas c’est le policier qui, envouté par la musique, se jeta par la fenêtre, croyant plonger dans l’océan.

© Isabelle-Marie d’Angèle (agenda ironique Avril)

Va et Vient 12

Bonjour toi 😉

Me revoilà avec ce nouvel exercice auquel j’avais participé le mois dernier sur le thème Invalides que tu peux retrouver ici ou ici . Celui-ci sera publié dans la rubrique Défis-Challenges que tu trouveras dans le menu déroulant de l’Accueil.

Dans la lignée des célèbres Vases communicants, le jeu littéraire intitulé Va-et-vient consiste en un échange entre deux auteurs qui écrivent un texte, illustré ou non, sur le blog de l’autre. Il paraît tous les premiers vendredis du mois. Le thème de ce numéro 12 est Complicités

Ce mois-ci, j’ai le plaisir d’accueillir ici, mon complice d’un jour 😁Jérôme Decoux (carnets paresseux), qui publie ma contribution Complice pour toujours sur son blog https://carnetsparesseux.wordpress.com/.

Voici donc son texte avec sa propre illustration qui soi-dit en passant, j’aime beaucoup 😊.

Là-haut, un grand soleil jaune dispense ombre et lumière sans même y penser. Trois nuages glissent mollement, faute de mieux à faire.

Autour, il y a les champs, brun, vert tendre, vert pale, jaune foin selon ce qu’il y pousse. Entre les champs, passent des chemins terreux. Et encore la forêt, sombre et épaisse et pleine de mystère et de champignons.

Au milieu, les quatre murs jaunes qui cernent la cour de la ferme. Là, chacun vit sa vie. Pataud dort, et rien ne le réveille que ses rêves. L’autre chien, celui qu’on appelle Olibrius, mais aussi tout simplement Le Chien et parfois Radar, non pas parce qu’il repère tout ce qui se passe mais à cause de ses incessants va-et-vient entre les quatre murs de la cour, comme un palindrome qui aurait la langue qui pend, l’autre chien , donc, fait justement un de ces va-et-vient qui lui valent son surnom.  

Quoi d’autre ?

Trois poules picorent la poussière. Les canards collent leur pattes palmiformes à la vase de la mare.  

Le dindon ? il lorgne les tournesols à travers le grillage du jardin.

Et puis quoi plus ? Les poussins ? Ils pioutent.

Et pourtant.

Egoïstes, indifférents, voraces, paresseux. Et pourquoi pas ? Qui leur demande d’être altruistes, généreux, bienveillants ou quoi que ce soit d’autre ? Pas la fermière, qui fait ses trucs de fermière, en coulant de temps en temps un drôle de regard vers l’eau de la fontaine.

Et pourtant. S’ils n’étaient pas là, qui d’autres songeraient, sans même vraiment y penser, à une forme lourde et haute qui sortirait de la forêt sombre et trotte à long galop chaloupé par les champs jusqu’aux murs de la ferme ? Chacun y ajoute sa pièce, son morceau du gros patchwork inconnu. Et comment autrement ? Poules, canards, poussins, et même les deux chiens, tout seuls, ils sont trop petits, chacun, pour fabriquer une apparition pareille. Et sans modèle : c’est pas la Saskatchewan, ici !

Bien malin qui pourrait dire qui fait quoi : Radar, qu’on dit aussi Olibrius, les larges bois biscornus qu’on croit qu’ils cognent contre la porte close du porche ? Alors la haute bosse peulue dont la seule ombre remplirait la cour, c’est Pataud qui l’imagine.

Les poules sans sans-cesser de picpiquer du bec à ras-du-sol, on parierait qu’elles en tiennent pour les sabots cornus qui lèvent la poussière jaune.  

Les canards ? eux, ce sera le long brâme enroué qui fait trembler les tuiles rouges en haut des murs jaunes ; pas si différent de leurs coinquements, à si peu de chose près.

Le dindon ? Même absenté devant la lente danse ondulante des géraniums anémiés derrière le grillage, il participe. Les jarrets durs comme des branches, les grands yeux si doux, le mufle large et un rien baveux… oui, ça pourrait bien être bien sa contribution.

Qu’est-ce qu’ils apportent, les poussins, pioutant à pioute-que-tu-piouteras ? Pas la peine de savoir quoi, suffit de pas croire que sans eux les autres y arriverait, à parfaire l’orignal qu’ils rêvent tous.

Et la fermière ? Elle laisse faire ? Pire – ou mieux – elle y prête la main, sans rien en montrer, à sa façon de fermière. Est-ce qu’elle n’est pas entre les mêmes quatre murs jaunes, bordés des mêmes champs vert pâle et tendre, sous le même ciel nu où glisse le soleil, la lune et trois nuages. Paresseuse ? ça, non, puisque fermière. Alors, égoïste, indifférente ? Peut-être bien. Pourquoi pas ? Mais aussi – surtout – , complice de ces complices à la poursuite leur rêve général.

© Jérôme Decoux

Tu trouveras les autres échanges sur les blogs respectifs de :

M.-C. Grimard (promenades en ailleurs) : https://mariechristinegrimard.wordpress.com/ avec Marlen Sauvage (les ateliers du déluge) : https://les-ateliers-du-deluge.com/

Dominique Autrou (la distance au personnage) : https://ladistanceaupersonnage.fr/ avec Dominique Hasselmann (métronomiques) : https://hadominique75.wordpress.com/

Nicolas Bleusher (l’atelier) : https://nicolasbleusher.wordpress.com/ avec Amélie Gressier (plume dans la main) : https://plumedanslamain.wordpress.com/

Pour le prochain Va et Vient qui portera le n°13 et sera publié le premier vendredi du mois de mai, deux propositions : l’invention d’un hasard ou la phrase de Kerouac J’étais assez saoul pour accepter n’importe quoi.

Bonne lecture et n’hésite pas à aller découvrir les autres textes.

Merci Jérôme d’être venu faire un tour chez moi 😉

À très vite…

Une histoire sortie du tirage de dès

Bonjour toi 😉

Mots à placer : Cochon à la broche, diable, maison, carafe, coffre, bateau, puits, homme à la lanterne, funambule.

La fête au village

C’était la fête au village comme chaque année. Sur la place décorée pour l’occasion, de longues tables étaient installées. Les fenêtres des maisons qui l’entouraient étaient ouvertes et le parfum du cochon qui rôtissait à la broche depuis tôt le matin, embaumait les cuisines.

Chacun apportait sa vaisselle et ses nappes sorties des coffres qui renfermaient des trésors d’antan. De belles carafes attendaient qu’on les remplisse de vin et en l’honneur de ce banquet, le puits qui trônait au centre avait fait peau neuve. Sa margelle poncée et nettoyée accueillait aujourd’hui de grandes jardinières de géraniums.

Cette année, le comité des fêtes s’était démené pour  distribuer du bonheur et de la joie dans les yeux des enfants. Il avait décidé que les habitants devaient se costumer. C’est pourquoi on pouvait voir déambuler au milieu des tables, un homme avec une lanterne qui ressemblait étrangement à un nain du conte de Blanche-Neige. Un diable rouge tournait autour des braises et un marin cherchait désespérément son bateau. Un fil était tendu entre deux réverbères. Un funambule s’y entrainait avant le spectacle prévu dans la soirée.

Gageons que la fête sera belle et que chacun en gardera un souvenir inoubliable.

© Isabelle-Marie d’Angèle (mars 2024).

À très vite…