Agenda ironique de Février – Les stories perdues de Louis et Marie

Bonjour toi 😉

C’est chez Photonanie que ça se passe ce mois-ci. En voici les consignes.

Photonanie souhaite que la forme du texte soit présentée en un acte ou plus d’une pièce de théâtre, qu’il y ait un zeugme et d’y glisser les mots suivants :

Je n’ai jamais écrit de pièce de théâtre, aussi je demande toute ton indulgence. Pour le coup, je suis sortie de ma zone de confort pour la présentation, mais je pense qu’on y retrouve tout de même ma plume quelque part 😏.

Voici donc le 1er acte de cette pièce.

Les stories perdues de Louis et Marie

Les 3 coups résonnent. Le rideau s’ouvre sous les applaudissements du public. Nous sommes en novembre 2023, quelque part là-haut dans un coin de paradis.

Un couple est en train de lire. Le décor, le ciel. Lui, debout sur un nuage gris, car il souffre de cathisophobie depuis qu’il s’est assis sur un cactus et en a gardé un souvenir piquant et très désagréable parcourt le journal. Elle, sur un autre en forme de canapé blanc fait défiler des articles sur son téléphone. Soudain, elle sursaute et laisse échapper un cri. Elle manque par là même chuter de plusieurs mètres. Lui, surpris, tourne la tête vers elle.

Elle : Sire, étiez-vous au courant que nous avions été tous deux guillotinés en 1793 ? Cela ferait exactement 400 ans.

Le Sire en question abandonne son journal qui s’envole et sa colère gronde à un point que son teint vire ponceau, lui si pâle de nature. Sa moitié retient un éclat rire tellement il est drôle.

Lui : Fichtre, ça fait un bail ! comment est-ce possible ? Moi, Louis XVI, le roi des Français, guillotiné ? La peine de mort n’est-elle pas abolie depuis longtemps ?

Elle : Vous dites n’importe quoi très cher, en 1789, rappelez-vous, la révolution, la prise de la Bastille… et blablabla. Vous radotez, permettez-moi de vous le faire remarquer.

Lui : Vous avez raison, ma reine, la situation était… délicate.

Elle : C’est le moins que l’on puisse dire, Sire.

Silence. Il la rejoint sur le canapé qui ploie sous son poids. Il manque de tomber, car il reste debout. Il reprend :

Lui : Cessez de m’appeler ainsi, vous savez bien que cela n’a plus lieu d’être.

Elle arque ses sourcils impeccablement dessinés et remarque :

Elle : Oui, nous sommes morts, mais j’aime vous donner ce titre. Vous êtes toujours mon roi préféré. Et puis vous êtes idiot de ne pas vous asseoir vous me donnez le vertige.

Il la contemple de toute sa hauteur et fredonne Vertige de l’amour.

Lui : Vous êtes quand même drôlement bien conservée et je vous aime comme au premier jour.

Elle : Il y a bien longtemps alors.

Elle rit.

Soudain, il quitte le nuage, il semble marcher ou voler c’est selon comme on l’imagine à grandes enjambées. Il soliloque.

Lui : Je n’étais pas un roi de médiocrité. Que sont devenus mes travaux de serrurerie ? vous rappelez-vous ma chère, comme j’étais fasciné par la mécanique, la chimie et…

Elle le stoppe d’un geste.

Elle : Grand Dieu oui.

Elle se passe la main sur le front. Elle a lâché son portable. Il le rattrape au vol, il pense à haute voix qu’il s’en est fallu de peu pour qu’il disparaisse dans les nuages plus bas. Pour le retrouver, il se voit déjà dans ce coton ouateux en train de fouiller. Elle fronce les sourcils et s’inquiète. Elle ne comprend rien à ce qu’il raconte, ne serait-ce pas les prémices de la sénilité ? Cela fait quand même 400 ans, ce n’est pas rien !

Lui : Quel beau travail de précision ? Vous dites qu’il est écrit là-dedans que nous avons été guillotinés ? Comment ce si petit appareil peut-il être au fait de cette situation ?

J’espère tout de même que la lame était désinfectée, imaginez que nous soyons contaminés ? Ce serait le bouquet. De plus d’être mort, nous serions malades. Quelle horreur ! Avec la médecine qui balbutiait et n’était pas au point pour trouver les causes et les aboutissements.

Elle : Vous avez encore raison.Quand je pense que je suis passée dessous sept mois après vous. Je n’avais pas dû aller chez le coiffeur. Cela aurait été dommage d’abimer le travail de ma camériste.

Un rire sardonique se fait entendre, les nuages virent au gris. Il souffle :

Lui : Allons bon, je sens que nous l’avons encore froissé. Il est pire que du papier, pour un rien, il se fripe.

Elle : Calmez-vous très cher, ce n’est pas bon pour votre cœur. Même si nous sommes déjà morts, faisons comme si…

Le rideau se baisse. Le public applaudit.

© Isabelle-Marie d’Angèle pour l’agenda ironique de Février 2024

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À très vite…